Le sentiment de liberté, de légèreté, d'apesanteur procuré par ce déversement, ce déferlement, ce délestage, cette envolée quasi-lyrique de propos orduriers ne fut que de courte durée. Tout occupé à pourrir cette peau de banane - qui, tout bien considéré, n'en méritait pas tant ; j'aurais plutôt dû m'en prendre à l'abruti(e) qui avait mangé la banane contenue dans cette peau et avait laissé choir sur l'asphalte l'emballage naturel, maudire sa famille sur sept générations ascendantes et sept générations descendantes, insulter la femme de petite vertu qui l'avait porté(e) en son sein, cracher sur la tombe de tous ses ancêtres et menacer d'égorger ou d'étrangler tous ses proches en commençant par sa moitié s'il (si elle) n'était pas célibataire - je continuais d'avancer, d'un bon pas, la tête toujours tournée vers le fruit ou, plus exactement, vers sa peau désormais écrabouillée.
Et je ne vis pas le réverbère qui se dressait sur mon chemin. Obstacle vertical.
Les coïncidences m'amusent parce que, justement, je ne crois pas aux coïncidences. L'ironie, en revanche, est cruelle. Précisément au moment où je me débats avec La Montre, où je me casse les dents sur la réécriture de La Montre, où j'essaie en vain de modifier la dernière partie de La Montre, où je cherche à supprimer le dernier épisode de La Montre, épisode dans lequel un passant se prend un réverbère en pleine face - péripétie que je juge ridicule : certes drôle dans une bande dessinée ou un dessin animé mais incongrue dans un roman ou une nouvelle - je le prends moi-même, ce réverbère, en pleine poire.
Comme si cette rencontre avec un réverbère était un passage obligé de mon Œuvre (n'ayons pas peur des mots), qu'il était inscrit en moi, que je ne pouvais y échapper. Et, effectivement, le réverbère s'est inscrit en moi, s'est inscrit, incrusté, dans mon visage...
Bilan : fracture de la pommette, fracture de la mâchoire, deux canines et cinq molaires en moins...
À l'hôpital, pour le dîner, on m'a servi de la soupe de pois cassés, de la purée de brocolis et une banane.
Et je ne vis pas le réverbère qui se dressait sur mon chemin. Obstacle vertical.
Les coïncidences m'amusent parce que, justement, je ne crois pas aux coïncidences. L'ironie, en revanche, est cruelle. Précisément au moment où je me débats avec La Montre, où je me casse les dents sur la réécriture de La Montre, où j'essaie en vain de modifier la dernière partie de La Montre, où je cherche à supprimer le dernier épisode de La Montre, épisode dans lequel un passant se prend un réverbère en pleine face - péripétie que je juge ridicule : certes drôle dans une bande dessinée ou un dessin animé mais incongrue dans un roman ou une nouvelle - je le prends moi-même, ce réverbère, en pleine poire.
Comme si cette rencontre avec un réverbère était un passage obligé de mon Œuvre (n'ayons pas peur des mots), qu'il était inscrit en moi, que je ne pouvais y échapper. Et, effectivement, le réverbère s'est inscrit en moi, s'est inscrit, incrusté, dans mon visage...
Bilan : fracture de la pommette, fracture de la mâchoire, deux canines et cinq molaires en moins...
À l'hôpital, pour le dîner, on m'a servi de la soupe de pois cassés, de la purée de brocolis et une banane.
Incapable de mâcher le fruit maudit, j'ai dû, pour l'avaler, à la cuiller l'écraser.
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