Mes poches sont vides.
Dans la précipitation de mon départ de l'appartement, j'y ai oublié mon portefeuille, quelque part sur le meuble à chaussures, sur une étagère d'une bibliothèque ou sur la table de dissection où il a pu faire la belle et fortuite rencontre d'une machine à coudre et d'un parapluie - il faut vraiment que je relise Lautréamont, ça vire à l'obsession.
Je n'ai pas de monnaie. Pas de caillasse. Pas de mitraille. Pas un rond. Pas un kopek. Pas un radis.
À mon grand soulagement, je ne peux pas me payer de ticket de métro...
Certes, il ne me faudrait que quelques minutes, un quart d'heure, une demie heure tout au plus pour réunir les deux euros - ou quelque soit le prix aujourd'hui du ticket de métro... il change tous les six mois... qui, à Paris, quel Parisien sait combien coûte précisément un ticket de métro ? - nécessaires à l'obtention du sésame rectangulaire de carton blanchâtre barré sur toute la longueur de la si caractéristique bande brune. Il me suffirait pour cela de parcourir les rues du quartier, les yeux braqués sur le bitume ou le regard balayant les caniveaux pour récolter en pièces de 1 et 2 cents la somme fixée.
Les gens, étrangement, négligent les pièces rouges. Ils les fourrent sans leur prêter attention dans leurs fouilles. Les y oublient. Les laissent échapper sans même s'en rendre compte. Les abandonnent, volontairement ou non, à la caisse des magasins et dans les distributeurs. Et jugent non rentable l'effort de se baisser pour les ramasser quand ils en voient une à terre.
Pas moi. Au contraire. Bien au contraire : j'inspecte systématiquement les réceptacles à monnaie des caisses automatiques, je me précipite au sol au moindre éclat cuivré, je me fais à l'occasion pickpocket, je ne laisse jamais passer une opportunité de récupérer quelques centimes orangés. J'ai chez moi, caché, à l'abri, sous une trappe dissimulée dans le plancher, un sac rempli de pièces de 1, 2 et 5 cents. Il y en a pour plusieurs dizaines d'euros... en valeur faciale... mais ces pièces valent bien plus... Au cours actuel du cuivre, rien que le placage dépasse en valeur le montant affiché sur la pièce.
J'ai un temps envisagé de décaper délicatement mes pièces, sans en atteindre le cœur d'acier, avec une brosse métallique. J'ai renoncé cependant : le marché des sachets de poudre n'a pas bonne réputation. Je projette à présent de simplement faire fondre la fine couche de cuivre de mes pièces puis de revendre les lingots formés. Entre l'achat du matériel nécessaire et le coût de l'énergie, l'activité ne me serait pas encore rentable : j'ai fait mes calculs, tout mon bénéfice potentiel actuel y passerait et plus encore... il faut que je continue à accumuler des pièces... quelques milliers ou dizaines de milliers au minimum - pourquoi se fixer des limites ?
En considérant uniquement les pièces de 1 et 2 cents, près de 600 millions d'euros sont en circulation. Si j'en récupère suffisamment, je pourrais fondre assez de cuivre pour m'assurer un joli pactole...
Mais ce n'est pas le moment. Le temps c'est de l'argent... et je suis en retard, très en retard. Je n'ai pas une demie heure à perdre. Et si, j'en disposais, de cette demie heure, je la consacrerais à bâtir ma fortune, plutôt qu'à me payer un ticket de métro... Jamais je ne gâcherais mes pièces rouges dans un ticket de métro.
Dans la précipitation de mon départ de l'appartement, j'y ai oublié mon portefeuille, quelque part sur le meuble à chaussures, sur une étagère d'une bibliothèque ou sur la table de dissection où il a pu faire la belle et fortuite rencontre d'une machine à coudre et d'un parapluie - il faut vraiment que je relise Lautréamont, ça vire à l'obsession.
Je n'ai pas de monnaie. Pas de caillasse. Pas de mitraille. Pas un rond. Pas un kopek. Pas un radis.
À mon grand soulagement, je ne peux pas me payer de ticket de métro...
Certes, il ne me faudrait que quelques minutes, un quart d'heure, une demie heure tout au plus pour réunir les deux euros - ou quelque soit le prix aujourd'hui du ticket de métro... il change tous les six mois... qui, à Paris, quel Parisien sait combien coûte précisément un ticket de métro ? - nécessaires à l'obtention du sésame rectangulaire de carton blanchâtre barré sur toute la longueur de la si caractéristique bande brune. Il me suffirait pour cela de parcourir les rues du quartier, les yeux braqués sur le bitume ou le regard balayant les caniveaux pour récolter en pièces de 1 et 2 cents la somme fixée.
Les gens, étrangement, négligent les pièces rouges. Ils les fourrent sans leur prêter attention dans leurs fouilles. Les y oublient. Les laissent échapper sans même s'en rendre compte. Les abandonnent, volontairement ou non, à la caisse des magasins et dans les distributeurs. Et jugent non rentable l'effort de se baisser pour les ramasser quand ils en voient une à terre.
Pas moi. Au contraire. Bien au contraire : j'inspecte systématiquement les réceptacles à monnaie des caisses automatiques, je me précipite au sol au moindre éclat cuivré, je me fais à l'occasion pickpocket, je ne laisse jamais passer une opportunité de récupérer quelques centimes orangés. J'ai chez moi, caché, à l'abri, sous une trappe dissimulée dans le plancher, un sac rempli de pièces de 1, 2 et 5 cents. Il y en a pour plusieurs dizaines d'euros... en valeur faciale... mais ces pièces valent bien plus... Au cours actuel du cuivre, rien que le placage dépasse en valeur le montant affiché sur la pièce.
J'ai un temps envisagé de décaper délicatement mes pièces, sans en atteindre le cœur d'acier, avec une brosse métallique. J'ai renoncé cependant : le marché des sachets de poudre n'a pas bonne réputation. Je projette à présent de simplement faire fondre la fine couche de cuivre de mes pièces puis de revendre les lingots formés. Entre l'achat du matériel nécessaire et le coût de l'énergie, l'activité ne me serait pas encore rentable : j'ai fait mes calculs, tout mon bénéfice potentiel actuel y passerait et plus encore... il faut que je continue à accumuler des pièces... quelques milliers ou dizaines de milliers au minimum - pourquoi se fixer des limites ?
En considérant uniquement les pièces de 1 et 2 cents, près de 600 millions d'euros sont en circulation. Si j'en récupère suffisamment, je pourrais fondre assez de cuivre pour m'assurer un joli pactole...
Mais ce n'est pas le moment. Le temps c'est de l'argent... et je suis en retard, très en retard. Je n'ai pas une demie heure à perdre. Et si, j'en disposais, de cette demie heure, je la consacrerais à bâtir ma fortune, plutôt qu'à me payer un ticket de métro... Jamais je ne gâcherais mes pièces rouges dans un ticket de métro.
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