À deux cents mètres à peine des escaliers qui descendent à la station se trouve l'entrée, condamnée par des grilles et des portes fermées à double tour, d'une autre station, interdite au public. Une station fantôme.
Petite explication lexicale, petite transition culturelle pour occuper les quelques instants durant lesquels je parcours péniblement - je rappelle que je n'ai plus que neuf orteils, ce qui provoque un léger déséquilibre (et donc une certaine lenteur) dans ma démarche - lesdits deux cents mètres. Le récit de ce court (en distance, pas si peu long en minutes) déplacement n'aura en effet (du moins, je l'espère) aucun intérêt - autant parler d'autre chose.
Les stations fantômes sont les plus belles stations de métro. Comme dans toutes les autres stations, deux voies centrales, sur lesquelles circulent en deux sens (le métro roule à droite, comme les voitures) dans un bruit strident de frottement métallique, les rames, occupent le fond d'un fossé profond d'un mètre cinquante environ qui sépare les quais au sol bitumé, le tout sous un plafond de blanche faïence. Ce qui distingue les stations fantômes des autres stations du réseau du métropolitain et les rend si précieuses, si agréables, ce qui fait que je (et je suis loin d'être le seul dans ce cas, j'en connais beaucoup, des amateurs de stations fantômes) les préfère à toutes les autres stations (que, pourtant j'aime d'un amour inconditionnel) n'est pas tant l'obscurité qui y règne, pas plus que l'abondance des graffitis qui habitent les murs mais bien l'absence totale de voyageurs, d'usagers. Ce sont des stations de métro où passe le métro mais où l'on ne peut pas prendre le métro, que le métro ne dessert pas... des stations libres, refusant leur vocation, la voie pour elles toute tracée, de véritables poches de résistance... des stations qui aiment tellement le métro qu'elles refusent qu'il soit gâché par des occupants... des îlots de nature sauvage, non polluée par l'humain, au sein de l'urbain...
Il existe deux sortes de stations fantômes. Celles qui ont déjà vu passer des voyageurs. Celles qui en sont vierges. Les premières, pour la plupart, ont été fermées lors de la seconde guerre mondiale et n'ont jamais été rouvertes, rendues (soi-disant) inutiles par des prolongements de lignes ou l'ouverture d'autres stations à proximité. Champ de Mars, Croix-Rouge, Arsenal en sont quelques exemples. Les secondes ont été construites lors de projets d'extension mais abandonnées avant même leur mise en service - les projets d'extension ayant entre-temps capoté ou ayant été profondément modifiés. Ces secondes, dont la plus connue est Haxo, sont plus mystérieuses, plus attirantes que leurs proches cousines.
Bien entendu, pour ne pas révéler l'endroit où je vis, je ne vous dirai pas devant quelle station fantôme j'arrive à présent - ce ne fut pas aussi long que je le redoutais. Les hordes de lecteurs et lectrices attentifs pourraient alors faire, grâce à ce texte, le chemin à l'envers et découvrir mon adresse - je tiens à ma tranquillité.
Petite explication lexicale, petite transition culturelle pour occuper les quelques instants durant lesquels je parcours péniblement - je rappelle que je n'ai plus que neuf orteils, ce qui provoque un léger déséquilibre (et donc une certaine lenteur) dans ma démarche - lesdits deux cents mètres. Le récit de ce court (en distance, pas si peu long en minutes) déplacement n'aura en effet (du moins, je l'espère) aucun intérêt - autant parler d'autre chose.
Les stations fantômes sont les plus belles stations de métro. Comme dans toutes les autres stations, deux voies centrales, sur lesquelles circulent en deux sens (le métro roule à droite, comme les voitures) dans un bruit strident de frottement métallique, les rames, occupent le fond d'un fossé profond d'un mètre cinquante environ qui sépare les quais au sol bitumé, le tout sous un plafond de blanche faïence. Ce qui distingue les stations fantômes des autres stations du réseau du métropolitain et les rend si précieuses, si agréables, ce qui fait que je (et je suis loin d'être le seul dans ce cas, j'en connais beaucoup, des amateurs de stations fantômes) les préfère à toutes les autres stations (que, pourtant j'aime d'un amour inconditionnel) n'est pas tant l'obscurité qui y règne, pas plus que l'abondance des graffitis qui habitent les murs mais bien l'absence totale de voyageurs, d'usagers. Ce sont des stations de métro où passe le métro mais où l'on ne peut pas prendre le métro, que le métro ne dessert pas... des stations libres, refusant leur vocation, la voie pour elles toute tracée, de véritables poches de résistance... des stations qui aiment tellement le métro qu'elles refusent qu'il soit gâché par des occupants... des îlots de nature sauvage, non polluée par l'humain, au sein de l'urbain...
Il existe deux sortes de stations fantômes. Celles qui ont déjà vu passer des voyageurs. Celles qui en sont vierges. Les premières, pour la plupart, ont été fermées lors de la seconde guerre mondiale et n'ont jamais été rouvertes, rendues (soi-disant) inutiles par des prolongements de lignes ou l'ouverture d'autres stations à proximité. Champ de Mars, Croix-Rouge, Arsenal en sont quelques exemples. Les secondes ont été construites lors de projets d'extension mais abandonnées avant même leur mise en service - les projets d'extension ayant entre-temps capoté ou ayant été profondément modifiés. Ces secondes, dont la plus connue est Haxo, sont plus mystérieuses, plus attirantes que leurs proches cousines.
Bien entendu, pour ne pas révéler l'endroit où je vis, je ne vous dirai pas devant quelle station fantôme j'arrive à présent - ce ne fut pas aussi long que je le redoutais. Les hordes de lecteurs et lectrices attentifs pourraient alors faire, grâce à ce texte, le chemin à l'envers et découvrir mon adresse - je tiens à ma tranquillité.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire