Je ne pense pouvoir échapper au fait que ma descente dans la station fantôme apparaisse comme une plongée métaphorique dans les méandres de mon esprit triste et tordu où le coq à l'âne, le calembour et le mot-valise fleurissent et fanent aussitôt tout au long de phrases bien trop longues pour ce qu'elles ont à exprimer. Seul dans le tunnel autrefois émaillé de blanc, je n'ai personne de qui me moquer, personne sur qui exercer mon ironie factice, destinée à cacher ma propre vulnérabilité. Seul, je ne suis plus à l'abri de moi-même, je pourrais bien me retomber dessus.
J'ai un peu peur. J'ai peur. Pour me rassurer, je fais le malin. Je paonne mon second prénom, celui du L de MLM et de Maurice L. Maurice - Maurice L. Maurice est mon nom, celui que je me suis choisi, celui derrière lequel je me dissimule pour répandre mes cochonneries : si je m'appelais véritablement Maurice L. Maurice, croyez-moi, j'aurais pris un pseudonyme - que les profondeurs me renvoient en d'indénombrables écho charlie hotel oscar scar scar scar ar ar ar... ce qui ne fait que renforcer ma tourmente - je me sens assailli, harcelé par moi-même.
J'ai besoin, pour me rassurer, pour ne pas sombrer, d'un peu de lumière, la vague lueur verdâtre signalant les issues de secours ne me suffit pas. J'ai heureusement toujours des allumettes sur moi. Il faudrait toujours avoir des allumettes sur soi. Sauf quand on s'installe dans une boîte en carton - mais ceci est une autre histoire, prévue pour le printemps.
Avec mes moufles de poche, craquer une allumette n'est en rien facile, je brise le bâtonnet de peuplier de plusieurs d'entre elles avant d'obtenir une flamme. Mais alors quel spectacle quand le soufre s'embrase ! Si j'en crois la décoration rupestre, je suis dans la grotte de Lascar. Son nom - parfois orthographié Laskar voire Lasker (rien à voir, je présume, avec le joueur d'échecs, pas celui de Zweig) - au milieu d'une multitude de dessins figurant soit des hommes fumant d'étranges cigarettes coniques soit des chiens que je n'aimerais pas promener en laisse - s'étale en immenses lettres capitales, de toutes les couleurs, sur les parois du boyau. L'ensemble, aussi magnifique qu'il soit, sonne comme un avertissement : je suis ici sur un territoire qui n'est pas le mien et je ferais bien de hâter le pas et de déguerpir avant que le propriétaire des lieux ne reviennent dans sa tanière avec sa meute et ses joints.
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