En tant qu’auteur, je fais ce que je veux, disais-je. Plus ou moins.
Tricher, par exemple, fait partie de mes attributions. J’entends par tricher, faire comme si je n’avais pas dit certaines choses que pourtant j’ai dites et faire comme si j’en avais dit d’autres que pourtant j’ai tues. Ne pas me considérer obligé de tout expliquer. De tout raconter. Me permettre de procéder par ellipses. Sans avoir à me justifier. M’autoriser à sauter un épisode. Plusieurs épisodes mêmes. Négliger un enchaînement. Et faire comme si c’était naturel. Passer sous silence deux ou trois heures d’une journée que je prétends pourtant raconter in extenso. Tout en continuant à utiliser le présent de l’indicatif. Comme si de rien n’était.
Je peux me trouver à un endroit dans Paris et, le paragraphe d’après, à l’autre bout de la ville. Sans réelle rupture dans la narration. Et sans avoir recours à la science-fiction - je n’en ai vraiment pas envie. Il suffit que je l’écrive ainsi. Je suis à deux rues de chez moi. Dans un bar. La nuit tombée et beurré ou proche de l’être.
Les obstacles qui se dressent devant moi et les blessures qui me ralentissent, de même, peuvent s’évanouir sans explication. Il suffit de les passer sous silence. De les noyer entre les lignes. Qui, de toute façon relira un jour En Retard en entier ? Ce que j’ai subi il y a déjà plusieurs semaines dans ce texte, tout le monde l’a oublié. Inutile donc de le rappeler. Mon pied et ma main blessés, par exemple, qui s’en souviendra si je n’en parle plus ?
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