Albert Merle fut interrompu dans ses réflexions par un doute : avait-il coupé le gaz ? ... et sa cigarette qu’il avait laissée se consumer dans le cendrier, sur la table de la cuisine, sans prendre la peine de l’écraser.
Il se précipita hors de la cabine de douche, les pieds mouillés, glissa sur la carrelage, perdit l’équilibre. Sa tête traversa la paroi de douche. Carotide et jugulaire sectionnées nettes. Bain de sang.
Tandis qu’il agonisait, il se rappela clairement, distinctement, avoir éteint le gaz avant de s’installer à la table de la cuisine et d’allumer sa cigarette.
Albert Merle se redressa brutalement. Tremblant. Trempé de sueur. Le souffle court.
Posant les mains tout autour de lui, dans de petits mouvements rapides, aléatoires, incontrôlés, nerveux, il fut surpris, sous ses doigts, de reconnaître ses draps rêches, son matelas creusé et son oreiller trop mou. Surpris de reconnaître son lit. D’être dans son lit.
Quel horrible cauchemar...
Et c’est ainsi que s’éteignit Albert Merle. Dans son lit. Rêvant encore et encore et encore d’une mort violente qui ne serait pas la sienne. Et ne parvenant jamais à se réveiller.
VLV, 1920
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