Emprunter un livre à la bibliothèque (et le lire) n’est pour moi qu’une étape. Tout livre que j’emprunte à la bibliothèque est destiné a priori à rejoindre ma propre bibliothèque - je peux dire la même chose des disques, on l’aura compris. À la seule condition qu’il me plaise, me séduise, il va de soi. On ne compte plus les volumes peu usés de ma bibliothèque, ceux dans lesquels je ne fais que picorer de temps à autre, les ayant déjà lus en entier dans un exemplaire emprunté. Et qui me sont pourtant indispensables, que j’ai besoin de savoir à disposition, prêts à être relus à tout moment.
Il faut simplement qu’on m’accorde un peu de temps, je ne peux pas tout acheter en même temps. J’ai ainsi mis une douzaine d’années à acheter Le Traducteur Cleptomane et autres histoires. Dans un premier temps, après avoir rendu à la bibliothèque de Compiègne le poche publié par les éditions Viviane Hamy, j’en ai cherché un exemplaire dans toute librairie où je mettais les pieds. Je n’avais pas envie de passer commande sur le net. Si j’achète de nombreux disques en ligne, je m’y refuse, la plupart du temps, pour les livres. Les livres s’achètent en librairie. À la FNAC à la rigueur. Dans les gares si on aime la mauvaise littérature. Chez Monoprix dans un moment faiblesse.
Je l’ai longtemps cherché mon exemplaire de Le Traducteur Cleptomane. Une petite poignée d’années. Puis j’ai abandonné. Et le temps a fait son œuvre. Et j’ai oublié le titre du recueil de nouvelles. Et le nom de l’auteur s’est peu à peu modifié dans mon esprit.
Chez Page & Plume, il y a quelques semaines, je cherchais des romans ou des essais de Kundera. Pour remplacer mes éditions de poche. Bien qu’amateur de La Pléiade, - quand je vous parlais de livres peu usés, rarement sortis des étagères - je n’ai jamais envisagé d’acheter les volumes consacrées à L’Oeuvre de Milan Kundera. Je cherchais les couvertures crème de chez Gallimard. D’abord dans le rayon littérature française - qu’il faudrait renommer francophone - puis, en trainant des pieds et en faisant la moue, en littérature d’Europe Centrale : il y en a qui classent encore Kundera là dedans. De Kundera, il n’y avait pas mais c’est là, que je suis tombé, dans une édition Le Livre de Poche, couverture bleue figurant des hommes en haut de forme et redingote noirs, pantalon gris et guêtres blanches, sur Le Traducteur Cleptomane et autres histoires.
Je ne me suis pas plongé immédiatement dans sa lecture - j’avais acheté le même jour Pantagruel auquel j’ai accordé la priorité puis ai entamé le Quichotte - je l’ai mis de côté, pour les vacances. C’est sur la plage que j’ai relu ces nouvelles qui m’avaient plu il y a douze ans. Les premières, je les ai lues dans la position intermédiaire entre assis et couché qu’on adopte sur la plage de sable, sur la serviette de bain ou sur la natte en osier. La plage sud, sous les robiniers faux-acacias. Les dernières, je les ai lues debout, sur la plage de l’Espérance, marchant dans le sable ou les pieds dans l’eau. On devrait toujours lire debout, je le sais. On est plus concentré, on réfléchit mieux debout, se déplaçant. Pourquoi alors, naturellement, habituellement, chercher un fauteuil ou un canapé pour ouvrir un livre ? Pourquoi lire au lit ? De quoi ai-je peur ? De me sentir ridicule à déambuler un livre à la main à travers mon salon, mon couloir, mon bureau ?
PS : je viens d’apprendre le décès de Pierre Alferi. La littérature perd un grand nom - inconnu du grand public. Précipitez vous (entre autres) sur son recueil Kub Or si ce n’est déjà fait.
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