J’ai vu la ville moderne, la ville du futur, celui que l’on imaginait il y a soixante ans et que l’on bâtissait, à Brasilia ou ailleurs. Plan carré. Rues rectilignes, si larges que le vent ne s’y engouffre pas, il les balaye comme une plaine. Ici, des immeubles d’habitation, immenses parallélépipèdes rectangles qui ne donnent à la rue qu’une surface blanche, lisse, sans ouverture, adaptation au réchauffement climatique. Au milieu, une cour intérieure, une fente, vers laquelle toutes les fenêtres sont tournées. Plus loin, des tours rondes, réservoirs à eau, à grain, sites de stockage de données, d’énergie, que sais-je ? Ceci ressemble à des centrales électriques d’un nouveau genre, gigantesques cercles autour desquels court un fil de cuivre, je n’en connais pas le fonctionnement. Là, une place démesurée, qui à elle seule pourrait contenir toute la population de la ville, la place publique, ceinte d’un muret et de colonnes imposantes, il s’agit ici d’en imposer, de montrer aux habitants que la cité est plus grande que ses individualités. Jouxtant la place, un bâtiment aux formes moins simples, le palais présidentiel, l’hôtel de ville, le Palais Royal, quel régime pourra imposer la construction ex nihilisme d’une telle ville ? Enfin, là bas, le quartier d’affaires, reconnaissable à ses hautes tours rivalisant de couleurs et de hauteurs, le capitalisme n’aura pas été aboli, on dirait.
C’est un travail magnifique que cette ville. Cette maquette, ce n’est qu’un projet. Je ne sais qui en est l’auteur. Et je suis étonné de l’avoir sorti d’un carton qui trainait sous le bureau de la salle de techno du collège de Châtelus. Il y a donc de sacrés talents, là-bas.