mardi 7 avril 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (8)

Boris Johnson bientôt sous respirateur artificiel ? Le Royaume-Uni retient son souffle...


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On entre dans la quatrième semaine d’enfermement... on ne relâche pas ses efforts... on y est presque... plus que trois ou quatre soirées à finir bourrés avant de pouvoir se déclarer alcooliques... ce serait dommage d’abandonner si près du but.


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Malgré les apparences, mon prochain texte publié ici n’est en rien un texte de confinement.

lundi 6 avril 2020

En Léger Différé de chez Maurice Confiné (2)

Je le disais l’autre jour, j’ai un peu rangé mon bureau. J’ai à cette occasion retrouvé des brouillons non utilisés. Y compris des gribouillis. Mais même d’un gribouillis, on peut tirer quelque chose. Je pars du principe que rien de ce que je produis ne doit être inutile. Je suis donc parti samedi après-midi de ce gribouillis retrouvé, ai ajouté peu à peu des éléments autour, y compris des éléments issus d’autres gribouillis réalisés dans mon carnet... et voici le résultat. Je suis assez content de moi.
Et l’avantage du confinement, c’est qu’il fournit des titres aux œuvres sans que l’on ait besoin de se casser la tête.

Sans Autre But - 19ème jour de Confinement
(14 x 14 cm)
Gribouillis - feuille volante non datée

Gribouillis - Carnet de MLM

dimanche 5 avril 2020

En Retard (45)

Plus on a de temps disponible devant soi, plus on est en retard... c’est bien connu... c’est une sorte de corollaire à loi de Murphy (également connue sous le nom de loi de l’emmerdement maximum), à moins que ça n’en soit (c’est moche comme formulation, non ?) une espèce de réciproque ou encore, option non négligeable vu mon présent taux d’alcoolémie, que ça n’aie absolument rien à voir...
Tout ceci pour dire qu’en cette période de confinement, je devrais avoir tout le temps d’avancer sur En Retard, je devrais pouvoir m’y prendre à l’avance, ne pas me contenter d’y réfléchir comme le reste du temps (lorsque je « travaille » (notez les guillemets)), le vendredi après-midi pour le samedi et le samedi soir pour le dimanche... mais non... il est dimanche 16h00 et je commence à peine à me demander comment je vais organiser la suite des événements...
Et là, je bloque un peu... comprenez, je suis en train de me faire refaire le portrait par les CRS=SS et j’ai prévu pour la suite de déplacer le combat à l’Arc de Triomphe (souvenez-vous, dans un numéro précédent, on m’a fait revêtir un gilet jaune, l’allusion n’est pas subtile)... avant de finir la journée dans un bar qui sera la théâtre d’une gigantesque beuverie (on va s’en boire, des petits jaunes)...
Cependant, cet ensemble de péripéties va me prendre plus d’un numéro... et je ne sais où couper l’action... car je dois la couper, l’action...
En effet, il n’y aura pas de En Retard le week-end prochain. Ni le week-end d’après, possiblement... je ne sais encore... Pourquoi ? Parce que, dans les jours qui viennent, je vais vous proposer un texte (deux, à vrai dire, qui s’enchaînent et qui, d’une certaine façon, n’en forment plus qu’un) qui me tient particulièrement à cœur et qui va prendre 5 ou 7 ou 10 ou 20 numéros (je n’ai pas encore procédé au découpage) et que je refuse catégoriquement d’interrompre...

Je suis donc en plein doute, je ne sais comment poursuivre aujourd’hui...
Dans le doute, abstiens-toi, dit le proverbe... dont acte...

samedi 4 avril 2020

En Retard (44)

Je ne comprends pas cet entêtement des forces dites de l’ordre à faire usage de gaz lacrymogènes. Pourquoi toute manifestation devrait-elle finir dans les larmes et les suffocations ? Pourquoi ce besoin de dramatiser la situation, de rendre douloureuse la nécessaire débandade d’une fin de parcours ?
L’usage d’un gaz hilarant pour faire cesser un rassemblement me semblerait tellement plus approprié. Ne serait-il pas plus agréable que tout le monde se roule par terre ? D’un pouvoir tout aussi incapacitant qu’un gaz lacrymogène, un gaz hilarant aurait, de plus, le mérite de montrer que ces affrontements et cette supposée haine entre ceux qui aiment descendre dans la rue et ceux qui aiment porter l’uniforme n’est qu’une vaste blague. Il sont les deux faces d’un même Janus. Deux entités qui ne peuvent vivre l’une sans l’autre et dont l’existence est justifiée par l’existence de l’autre...

C’est à ce genre d’inepties, de pensées absurdes, que j’occupe mon esprit pour oublier que je suis en train de me faire massacrer à coups de matraque - tant qu’à me faire briser les côtes et les tibias, j’aurais préféré rester avec Ginette, elle au moins savait érotiser la souffrance - et de me faire cramer à coup de sprays et de grenades mes beaux yeux vairons... D’un bleu et vert, respectivement le gauche et le droit, magnifiques intrigants, mes yeux virent peu à peu à un commun rouge, peu avenant, dépourvu de toute sensualité. Quel intérêt les policiers des Compagnies Républicaines de Sadisme ont-ils à m’ôter ce qui fait l’essentiel de mon charme ?

vendredi 3 avril 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (7)

Le confinement me change, modifie en partie ma façon de penser, me force à regarder certaines choses sous une perspective différente. Mais dans le fond, je reste le même.

Ainsi, le week-end dernier, en rangeant mon bureau - j’ai largement eu le temps de remettre du désordre depuis... - j’ai retrouvé un brouillon sur lequel j’avais écrit, après avoir fait une petite attaque de panique au rayon yahourts du Monoprix, le poemlm suivant :

Les courses au supermarché
Me donne envie de me suicider
Côtoyer l’humanité
Me donne envie de la suicider
06.11.19

Aujourd’hui, les courses sont vécues comme une chance, une opportunité de sortir, d’échapper quelques instants à l’enfermement. J’aime les courses en ce moment... changement...

Pour ce qui est de l’humanité, je n’ai pas changé d’avis... je reste le même...

jeudi 2 avril 2020

Un Texte de Maurice Confiné (3)

Où, ailleurs que sur les banquettes du métro, pourrais-je, pour me tenir au courant des dernières tendances, des derniers sons à la mode, coller mon oreille tout contre l’oreille d’une adolescente et saisir des bribes de ce que diffusent ses écouteurs ?
Qu’on ne se méprenne pas, je suis parfaitement conscient que ce type comportement est intrusif et on ne peut plus désagréable... personne n’aime les indiscrets, je le sais bien... il n’est rien de plus méprisable que d’écouter aux portes - fussent-elles des pavillons - on me l’a appris... n’étant pas un indélicat, j’ai mis sur pied un stratagème pour que les jeunes femmes dont j’épie la musique ne se sentent pas espionnées : pendant ma prise de son, je glisse une main sous leur jupe. Ça ne rate jamais, elles se méprennent sur mes intentions et oublient le dérangement  procuré par le chatouillement de mon lobe contre leur lobe.

Où, ailleurs que sur une banquette de métro arrêté pour régulation dans un tunnel entre deux stations, sans aucune perspective de fuite, pourrais-je accepter de m’infliger une interprétation de l’Ode à la Joie de ce bon vieux Ludwig van à l’accordéon et au violon tzigane sur fond de boite à rythme bas de gamme...
...et d’en ressortir profondément ému, totalement tourneboulé, l’estomac noué, les tympans percés, incapable de retenir mes larmes et doutant de mon envie de vivre plus longtemps - comment l’avenir pourrait-il renfermer quoi que ce soit d’aussi fort que ces trois minutes avec les Filles de l’Élysée ?

Où, ailleurs que sur la banquette du dernier métro, aurais-je la patience d’attendre qu’un vieux poivrot ait fini de vomir pour entendre la suite de son couplet raciste et sexiste ?

Le métro est le repaire des véritables artistes. De ceux qui n’ont que faire du bon goût bourgeois et ne se soucient pas des études de marché. Qui se sacrifient à leur art et refusent de rentrer dans le cadre imposé par la télévision et dans le format radio.
Le musicien du métro ne s’achète pas les instruments les plus chers. Il privilégie les instruments les moins populaires, usés de préférence, les instruments qui sonnent mal, ceux qui sont grincent et sifflent, ceux qui blessent l’oreille. Le vrai musicien sait que de la contrainte naît le plus pur des arts.
Le chanteur de métro sait bien que, pour construire une belle chanson, seules la fluidité, le rime et poésie comptent. Tout le reste n’est que secondaire. J’ai tellement d’exemples en tête qu’un seul suffira. Une image vaut mille mots comme disait l’autre - mais ça n’a pas grand chose à voir.
Je me souviens comme d’une révélation de cette femme entre deux âges trainant de wagon en wagon une enceinte fatiguée sur un diable brinquebalant. Sur une bande instrumentale méconnaissable, elle s’évertuait à redonner du sens et du son aux chansons les plus fades du répertoire français : les chansons play-backées par des Michel.
Les Michel (Fugain, Delpech, Jonasz... complétez vous même la liste) sont la lie de la chanson française, il n’en est pas un pour rattraper l’autre. Il devrait être interdit de faire carrière de chanteur en s’appelant Michel - le prénom est heureusement passé de mode, l’avenir musical s’annonce un peu plus radieux. Quand vint le tour de Michel Dassin (le pire de la bande) je m’attendais à tout, y compris au meilleur. Et ce fut sublime. 
Dire qu’il suffisait de modifier quelques syllabes, deux trois seulement, pour que la beauté naisse du néant : et si tout n’existât pas, dis moi porquoi j’existéras. Admirez la création de la rime interne, à l’hémistiche, au prix (fort raisonnable) d’une (très pardonnable) faute de conjugaison. Admirez ce recours inattendu (et, certes, incorrect) à l’imparfait du subjonctif pour construire une très belle assonance en a. Admirez ce pourquoi subtilement transformé en porquoi pour éviter qu’une assonance en ou ne vienne gâcher celle en a. Admirez enfin ce tu banal chez le fils de Jules qui devient ici un tout universel... ou comment d’une bluette mièvre faire une déchirante interrogation métaphysique.
Quel directeur artistique de maison de disques aurait accepté tant de risques syntaxiques ? L’art officiel n’admet que la tiédeur...



Et quand les musiciens du métro finissent leur petit concert et font le tour des usagers, un gobelet en plastique ou une boite de conserve rouillée à la main, c’est avec un véritable pincement au cœur que je refuse de leur donner les pièces et billets que j’ai en poche : hors de question de faire d’eux des vendus. Leur talent vaut bien plus que de l’argent.




Versailles, fin mars - début avril 2020,
deuxième et troisième semaines de confinement

mercredi 1 avril 2020

Un Texte de Maurice Confiné (2)

Pas moi. Non, je ne suis pas de ces salvadoristes acharnés du boulot qui ne font pas de vieux os et prennent le métro mais oublient de le rendre.
Si je prends le métro, si je me laisse, à mes risques et périls, prendre par le métro, si je paye chaque mois l’abonnement (par prélèvement) me garantissant un accès quasi illimité (le métro est fermé entre 2h et 5h du matin) aux souterrains de velours, ce n’est pas pour aller travailler (je le fais très bien (et le moins possible) de chez moi, travailler, confortablement assis à mon bureau... pourquoi un tel mensonge ? dans quel but ? enjoliver ma condition d’artiste raté ?... ma position à mon bureau n’a, en réalité, rien de confortable... je n’en possède pas de fauteuil, de bureau... seulement une vieille chaise pliante en bois dur... l’écriture de ce court texte m’aura valu une crise hémorroïdaire et des escarres aux fessiers), c’est certes parfois pour dormir (les secousses du métro me bercent et me livrent pieds et poings fermés au sommeil plus prestement qu’un épisode de série télévisée policière germanique), c’est surtout et essentiellement pour la musique.

Je suis un fou de musique. J’en écoute tout le temps. Au casque, à me rendre sourd. Sur la chaîne hi-fi, volume sonore poussé au maximum. En CD. En vinyle. En mp3. En K7 - non, je plaisante, pas en K7, je ne vis pas en 1979. Seul. Accompagné - parfois bien mal. En concert. Du rock. Du jazz. Du classique. De l’électro. De la soul. De la soupe. Du blues. Du reggae. Du folk. De la pop. Des variétés. Je suis insatiable. Boulimique.
Je suis constamment à la recherche de nouveaux sons, de nouvelles voix, de nouvelles voies. J’aime être surpris. Étonné. Pris au dépourvu. Déstabilisé. J’hante les médiathèques et les disquaires, je cours les soirées live des pubs, j’écume les clubs et les boîtes, je flâne sur YouTube et Deezer et Spotify, j’allume le matin la radio (fréquence : 105.1) avant même d’ouvrir les yeux...
Il n’est cependant de meilleur endroit au monde que le métro, ses couloirs et ses wagons, pour étancher ma soif de découverte musicale.

L’univers métropolitain est, de mon très pertinent point de vue, un univers entièrement dédié au son et, par conséquent, à la musique. Biologiquement, physiquement, physiologiquement, psychiquement consacré au son et, par conséquent, à la musique. De très sérieuses études menées par de très sérieux et rigoureux et respectés et éminents scientifiques ont en effet montré qu’un homme privé d’un ou de plusieurs sens, compense cette, si j’ose dire, infirmité en aiguisant ses autres sens, qui se trouvent donc renforcés. Or, l’odeur d’urine qui règne dans le monde souterrain me force à me boucher les narines et me coupe l’appétit tandis que toucher quoi que ce soit pourrait me valoir une infection et un séjour à l’hôpital - où règne un silence peu exaltant. Quant aux usagers du métro, ils n’aiment guère être observés, reluqués, scrutés, dévisagés...
Ne me reste que l’ouïe, le seul de mes sens libre de s’épanouir, qui peut alors donner sa pleine mesure (6/4). Pour le mélomane que je suis, le métro s’apparente à un inépuisable terrain de chasse jeu...