Je ne suis pas critique, c’est quelque chose que je ne sais absolument pas faire. On pourra me répondre que je ne suis pas plus écrivain, peintre ou dessinateur mais que ça ne m’empêche pas de - ce n’est pas faux. Aussi ai-je renoncé à ouvrir deux ou trois blogs supplémentaires - Blogger autorise jusqu’à cinq blogs par personne - l’un consacré au cinéma, l’autre à la littérature et, éventuellement, un dernier consacré à la peinture. Non seulement, cela m’aurait demandé trop de travail (j’ai déjà bien du mal parfois à remplir Archives et Disco1950 quotidiennement) sans même compter les temps de lecture ou de visionnage nécessaires mais, surtout, comment écrire chaque jour ou tous les trois jours ou toutes les semaines à propos de textes ou de films alors que j’intellectualise peu et que mon avis est avant basé sur un ressenti, une grande et assez intraduisible subjectivité ? Essayons tout de même.
Le Traducteur Cleptomane et autres histoires de Dezsö Kosztonlányi est, d’après Wikipédia, une escroquerie éditoriale. Les onze nouvelles réunies sur ce titre sont en réalité extraites d’un roman à la forme étrange intitulé Esti Kornél et désossé par un éditeur français. Cela a-t-il une importance ? Cela gâche-t-il le plaisir ? Je ne le pense pas. Le lecteur en effet aurait bien tort de bouder son plaisir à la lecture de ces courts récits bourrés d’ironie et révélateurs d’un esprit très inventif.
Je n’étais pourtant pas bien fier de mon achat en redécouvrant la première nouvelle, celle qui donne son titre au recueil. Rigolote. Et ce n’est pas forcément un compliment. L’histoire d’un traducteur qui est aussi cleptomane. Je souris mais je me dis que si les autres textes sont du même acabit, je ne finirai pas les seulement 200 pages du bouquin. Suit heureusement L’Argent. Ou comment la richesse peut devenir un problème pour qui souhaite rester pauvre. Délicieux.
Le Contrôleur Bulgare tient en équilibre précaire son récit d’un dialogue entre deux personnes qui ne parlent pas la même langue avant que La Ville Franche ne livre des petits trésors d’inventivité à chaque coin de ses rues où l’on ne sait mentir et surtout pas se vanter. La Disparition est plus convenue mais finit par mordre avec une morale tristement réaliste, comme, plus loin, Misère. Entre deux, Le Pharmacien et Lui constituait une pause plus réjouissante, presque tendre.
Le Manuscrit se moque des critiques, des lecteurs et des écrivaillons - je pourrais prendre triplement ombrage si c’était mal ficelé, ce qui n’est pas le cas... Le Chapeau, a priori petit exercice de style sur la perte d’un objet traitée comme un deuil, devient dans le contexte du recueil, un texte excessivement grinçant, corrosif. C’est la force aussi de ces textes ici réunis d’enfoncer le clou au fur et à mesure, de noircir peu à peu l’humour, de se répondre et de créer une ambiance qui bénéficie à chacun d’entre eux. La Dernière Lecture achève le recueil de la seule façon possible : la mort de l’artiste face au miroir, en narcisse.
J’ai lu les nouvelles dans l’ordre dans lequel elles sont proposées à une exception - des questions de timing trop longues à expliquer. J’ai achevé ma lecture par Le Président. Et je me réjouis d’avoir terminé par cet hymne à la sieste, cet éloge de ceux qui s’endorment en toute circonstance. Je me sens revigoré, moi qui suis en permanence fatigué. Revigoré ? non… mais j’ai bien moins de scrupules à aller m’allonger.
C’est ce que je craignais, les paragraphes précédant tiennent plus du résumé que d’autre chose. Il faudra s’en contenter…
Évidemment, ceux qui me connaissent savent bien qu’un recueil qui me réjouit tant ne peut rester sans effet… j’ai envie d’écrire des nouvelles… mais, merde, j’ai un roman à terminer… et je suis loin, loin, loin, très loin d’en avoir fini avec lui.