mardi 31 mars 2020

Un Texte de Maurice Confiné (1)

Dans le Métro


ce pourrait être une chevillardise...
encore une...



L’usager du métropolitain est plus prévisible que les coups de marteau du voisin lors de l’inauguration de ma sieste ante-méridienne, plus prévisible que l’apparition de certains symptômes liés à la Covid-19 (déshydratation, souffle court, sensation de fatigue) après un marathon, plus prévisible encore que l’incompétence crasse de nos gouvernants à gérer efficacement une crise. L’usager régulier du métro, celui qui d’un geste rapide, mécanique, plaque son badge d’accès (appelé Pass Navigo) sur la borne de validation des titres de transport et franchit sans même ralentir les portiques d’accès aux couloirs émaillés de carreaux blancs et parfumés à l’ammoniaque est plus prévisible encore : il est plus facile à décrypter qu’un article de 20 Minutes.

Demandez-leur, aux usagers du métro, pourquoi ils le prennent, le métro - idiotisme un peu étrange, il me semble, prendre le métro, dès lors que c’est le métro qui accueille les usagers en son sein, que c’est le métro qui, donc, les prend, les usagers, davantage que ce n’est l’inverse - pourquoi ils se serrent ainsi, dans les wagons, les uns aux autres et échangent plus de fluides corporels (sueur, larmes, postillons... ; par inhalation directe ou par contacts successifs avec les barres de métal destinées à faciliter, malgré les mouvements de la rame, la station debout) qu’un acteur et une actrice lors du tournage d’une scène d’un film pour adultes, pourquoi ils s’entassent ainsi, volontairement, dans un espace aussi confiné - Dans le Métro, va finir par croire le lecteur en quarantaine, est décidément un texte de circonstances - ils vous répondront - du moins, ceux qui accepteront de vous répondre ; ils ne sont, en général, pas nombreux, les usagers du métropolitain enclins à entamer une conversation avec un ou une inconnu(e) - qu’ils se rendent à leur travail ou, au contraire, rentrent du boulot, heigh-ho ! heigh-ho ! selon un mouvement que certains spécialistes des comportements humains contemporains qualifient de déplacement pendulaire et que d’autres résument plus lapidairement par l’expression métro-boulot-dodo.

On reconnaît bien, dans l’usager du métro, l’homo capitalisticus, qui ne vit en semaine que pour gagner de quoi mériter et s’autoriser un court repos dominical - repos qui lui permettra de supporter une nouvelle semaine de labeur. On reconnaît bien, dans l’usager du métro, le workaholic qui à la question Que faites-vous dans la vie ? est incapable de répondre qu’il respire, mange, boit, baise, se promène, rit, pleure, écoute, regarde, goûte, touche, sent, ressent, poétise, s’émeut, souffre, s’enthousiasme... et se contente de réciter son curriculum vitae et de vanter sa position sociale. Rien d’autre ne compte dans l’existence de l’homo economicus que son travail qui, il en est persuadé, ce pauvre fou, le rend chaque jour un peu plus libre. Privez-le de son occupation professionnelle, le voilà désoeuvré, il se meurt et se morfond au fond de son lit. Quand pourrai-je enfin retrouver le chemin de mon activité qui est à la fois mon identité et ma raison d’être ? Quand pourrai-je reprendre le métro et retourner au turbin ?

lundi 30 mars 2020

12ème jour de Confinement

Un essai réalisé samedi après-midi.
Pastels avec un peu de gouache, d’encre et de crayon.
Assez peu convaincu pour ma part.

12ème jour de Confinement
(26 x 38 cm)

dimanche 29 mars 2020

En Retard (43)

Nous partîmes trente ; mais par un prompt renfort,
Nous nous vîmes cent mille (mille deux cents selon la Police) en arrivant au port
APPPC (à peu près Pierre Corneille)


Nous quittons le tunnel pour les quais de la station la plus proche puis quittons les quais pour les couloirs de la station puis quittons les couloirs souterrains pour l’air libre. Nous sommes dans la rue. La foule est immense déjà. Il débouche de nouveaux manifestants de tous les coins de rue qui viennent grossir les (nos) rangs.
Les chants montent. Je ne comprends rien aux paroles - tout ceci manque d’articulation - je fais du yahourt (c’est ainsi que j’écris yahourt, n’en déplaise aux étymologistes) pour donner, depuis ma position faussement dominante, le change... la mélodie est entraînante.

Je ne fais pas attention à la direction que prend le cortège, trop occupé à dénombrer les troupes qui se rassemblent dans mon sillage, jusqu’à ce que j’aperçoive, au bout de la rue, l’Arc de Triomphe... nous sommes sur les Champs...
Je me penche depuis mon poste de vigie pour taper sur l’épaule d’un de mes porteurs. Ce n’est pas du tout mon chemin. J’ai rendez-vous. Je suis déjà en retard, très en retard. Et pointe du doigt la direction du Louvre - qu’est-ce que j’aimerais pouvoir retourner au Louvre et au Musée d’Orsay et au Musé d’Art Moderne et au Centre Pompidou et au Musée «»... tout ceci me manque terriblement en ce moment - et de Saint Michel ou de la Cité, bref, dans la direction opposée à La Défense...
Le porteur acquiesce. On me dépose au sol. On m’arrache ma toge de plastique bleu. On me donne un gilet fluo sans manche, comme ceux que l’on doit revêtir sur le bord de la route, en cas d’accident, pour être vu par les autres automobilistes et ne pas risquer d’être renversé. Je m’aperçois que tout le monde dans la foule qui me suivait en a passé de semblables. Le colosse auquel je m’étais adressé m’offre un large sourire, passe son bras derrière ma nuque et d’un coup de menton m’indique les bataillons de CRS qui prennent position face à nous. Avec tout le bruit ambiant, nous ne nous étions visiblement pas compris...

samedi 28 mars 2020

En Retard (42)

Je m’arrête. Une goutte de sueur froide se forme entre mes omoplates et me roule le long de l’échine (il a dû, en réalité, se former plus d’une goutte, pour arroser ainsi tout mon dos) jusqu’entre les fesses (certains appellent cette région du corps le SIF (pour Sillon Inter Fessier) et se le font épiler - mes contemporains m’intrigueront toujours).
La main du doyen quitte mon épaule et me saisit le poignet. Sa main est froide, tremble un peu mais la prise sur mon poignet est ferme. D’un mouvement décidé, auquel je ne peux m’opposer, à la manière d’un arbitre de boxe, il me fait lever le bras, tendu vers le plafond du wagon. Les XY de l’assistance à l’unisson se mettent à applaudir des deux mains - comme si on pouvait n’applaudira que d’une seule - à pousser des hourra et des bravo, à siffler, doigts dans la bouche. On vient me serrer la pogne, m’embrasser, me féliciter, on me fait des clins d’œil, on me gratifie de tapes dans le dos et sur le ventre ou de petites claques sur la joue, on rit, on me montre des pouces levés vers le haut, on me propose à boire dans des flasques de l’alcool bon marché et à fumer cigarettes mal roulées, cigarillos trop séchés et herbe de mauvaise qualité.
Je suis leur héros. Je suis leur héraut. Bien malgré moi.


Les portes du wagon s’ouvrent. Les portes de toute la rame s’ouvrent. Nous sommes toujours en plein tunnel. Je suis soulevé par quatre gaillards. Je n’ose protester. Je suis et subis le mouvement. Nous sortons. Une procession se forme rapidement dans le tunnel. J’en suis la tête, toujours porté, façon statue de la Vierge lors des célébrations du 15 août, par les quatre malabars. La foule des suiveurs grossit à vue d’œil. D’où viennent tous ces mâles alpha et bêta ?





mercredi 25 mars 2020

En Léger Différé de chez Maurice Confiné

L’espace et le temps sont liés - c’est le Professeur Emmett Brown qui le dit... il parle plus précisément de continuum espace-temps.
Le temps actuellement se dilate pendant que l’espace se rétrécit...

Temps de faire tellement de choses que je ne sais par où commencer et que je finis par être improductif. Tellement de choses à faire, tellement de choses que je voudrais faire que je bâcle ce que j’arrive à entamer... Une sorte de panique est en train de s’installer.
Pour Golgotha, ci-dessous, également intitulée Troisième Jour de Confinement ou, par Natacha, Les Trois Pendus, petite huile réalisée d’après un croquis vieux de près de huit mois (cf. plus bas encore) - ce qui, d’après mon cafouillage d’hier (j’ai honte de m’être aussi mal exprimé ; j’ai pourtant tout le temps de me relire...) est un bon temps de gestation - et que j’ai entamé le premier mars, je n’ai respecté aucun temps de séchage entre les couches. C’est une huile appelée à craqueler, cloquer, partir en morceaux d’ici quelques mois ou années... on verra bien.
Et maintenant elle sèche sur la planche qui jouxte mon bureau, juste à côté de Premier Jour de Confinement... planche sur laquelle je n’ai par conséquent plus beaucoup d’espace libre... ce qui fait que je ne peux raisonnablement entamer de nouvelle(s) huile(s)... alors que j’ai tout le temps pour ça...

There is no Space and Time comme chantait l’autre.

Golgotha - Troisième Jour de Confinement
Également dit « Les Trois Pendus »
(16 x 22 cm)

Golgotha - esquisse
Cahier de croquis


PS : Celui qui arrive à identifier l’alphabet utilisé au-dessus des trois pendus sur Golgotha - Troisième Jour de Confinement gagne une huile ratée originale.

mardi 24 mars 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (6)

Voici qu’on commence à nous présenter les antipaludéens comme des produits miracle contre le coronavirus.
Pourtant, vu le temps libre (offert par le confinement) dont on dispose pour fouiller nos bibliothèques, c’est plutôt le coronavirus qui semble efficace contre le pas-lu.


***


On a encore du mal à mesurer les conséquences possibles de plusieurs semaines de confinement sur la société. Que nous réservent les mois à venir ? Un nouveau baby-boom dans 8 mois ? Ou une explosion des divorces ? L’un n’empêchant pas l’autre...


***


Le télétravail ralentit fortement la productivité.
Personnellement, j’étais déjà à l’arrêt : j’ai donc passé la marche arrière.

lundi 23 mars 2020

Kerque chose en différé de chez Maurice Confiné

La semaine dernière, avec quelques jours de retard - retard que La Poste s’empressera d’attribuer au coronavitruc ; jamais de sa faute, à La Poste, c’est comme la SNCF - ont été livrés les lots pour les gagnants de notre jeu-concours de début d’année.
Ces lots probablement ne feront pas regretter leur abstention à ceux qui n’ont pas participé...
Parmi ces lots, deux petites huiles un rien naïves (on les rattachera au mouvement pictural dit du Breizhxit) réalisées en grande partie lors de notre séjour en terre morbihannaise - quelques retouches et finitions à Versailles ainsi que la totalité du séchage.

Alignements de Kerzerho, Erdeven
(10,5 x 14,5 cm)

Kerjean, Erdeven
(14,5 x 10,5 cm)

dimanche 22 mars 2020

En Retard (41)

Peu à peu, la lassitude et l’ennui s’installent. Les gifles et les claques cessent. Les larmes se ravalent. Les cris s’éteignent. Le calme s’impose de nouveau dans la rame.

Les regards se tournent vers moi. Je n’ai pas bougé de mon siège. Tout le long de la distribution de gifles, j’ai attendu. J’attends encore. Qu’attends-je ? je ne sais.
J’attends de voir comment tout ceci va se poursuivre et se terminer. Je ne suis pas rassuré. Je suis même inquiet... En effet, je suis en retard, très en retard - il me semble qu’il est bon de le rappeler - et de tels débordements ne sont pas de nature à me faire gagner du temps. Je remarque d’ailleurs que le métro est toujours arrêté dans le tunnel... quand repartira-t-on ?
J’attends de voir ce que l’on attend de moi. Oui, décidément, on me regarde. On me scrute. On m’épie. Je ne suis pas à l’aise. Je n’aime pas ces situations où je suis au centre de toutes les attentions. Si je voulais être objet de curiosité, j’écrirais des textes qui intéressent les gens, j’écrirais des livres qui se lisent. J’aimerais disparaître. J’aimerais me dissiper. J’aimerais m’évanouir. J’aimerais me cacher. Ici, dans mon propre texte, un pseudonyme - Maurice L. Maurice est un pseudonyme... bla-bla-bla, vous avez compris, relisez les passages correspondants, dans En Retard ou dans d’autres de mes textes - ne me suffit pas à passer inaperçu : les figurants ne font que me mettre en valeur, le lecteur me colle aux basques...

Puisqu’il ne m’est pas possible de m’éclipser sans être remarqué, je vais simplement partir. Comme si de rien était. Comme si sortir du train à ce moment là étai parfaitement naturel. Je me lève le plus doucement possible. Sans mouvement brusque. Sans geste qui pourrait être mal interprété. Sans (trop) trembler ni (trop) montrer ma peur. Me tourne, toujours aussi lentement, vers l’allée centrale du wagon. Fais un pas vers les portes.
Le doyen, celui qui a déclenché les hostilités, me met la main sur l’épaule.

samedi 21 mars 2020

En Retard (40)

Le claquement de la gifle du vétéran sur la joue de son épouse (ou jumelle) agit comme un signal de départ. Comme s’ils n’attendaient que le coup de feu du starter pour se mettre en action, tous les hommes du wagon, en un instant, se mettent à gifler les femmes présentes. Les époux giflent leur épouse. Les fiancés, leur fiancée. Les ados, leur petite amie ou leurs amies. Les frères frappent les sœur. Les célibataires et les solitaires endurcis s’en prennent aux esseulées, aux indépendantes et à celles qui ne sortent qu’entre copines. Quelques pervers pratiquent l’échangisme, frappent les compagnes des voisins et prennent du plaisir à voir leur moitié frappée par un autre.
Les claques se décochent par paires, par allers-retours ou par séries. Les plus hardis distribuent des fessées. Les plus vulgaires ajoutent à leurs coups crachats et insultes évoquant les prostituées et les femmes aux mœurs dites légères. Ceux qui se permettent de donner des coups de pied à celles tombées au sol sont vite rappelés à l’ordre par leurs camarades - il faut savoir raison garder : respect et dignité.

C’est la revanche des phallocrates, le retour des patriarches, la libération des mâles de l’oppression des féministes, des tenantes de l’égalité des sexes et des partisanes de la théorie du genre. Des années à baisser la tête, à accepter sans broncher d’être montrés du doigt, mis au banc des accusés et au ban de la société, les misogynes soudainement décident de résister et de laisser leurs convictions s’exprimer.



Les femmes, entre deux torgnoles reçues, ne se contentent pas de leur confortable rôle de victime. Elles aussi en profitent. La marmaille qui se pensait protégée des coups par la loi, intouchable, libre de procéder à toutes les bêtises sans crainte de représailles, récolte des mères les taloches qu’elles viennent de recevoir. Et pour les gamins qui se mettent à chialer et à hurler, c’est double dose : les pères abandonnent momentanément leur combat contre les amazones pour corriger les erreurs de la jeunesse qui ne sait obéir.
L’enfant roi, par une sorte d’effet domino, va devoir rendre son trône.

vendredi 20 mars 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (5)

Demain, c’est le week-end... que nous allons passer à la maison, sans en bouger...
Pour le moral, on dira qu’on a passé un week-end cool, reposant, un de ces week-ends où l’on a décidé de ne rien faire... c’est mieux que de se dire enfermés...


***


Confiné, enfermé depuis déjà trois ou quatre ou cinq jours - j’ai déjà perdu le fil du décompte - je n’en peux plus... je ne tiendrai pas... je vais mettre fin à mes jours... sauter par la fenêtre... m’écraser sur le bitume (récemment refait) du trottoir...
Une seule chose me retient encore... je ne sais quelle case cocher sur mon « Autorisation de Déplacement Dérogatoire » pour ainsi sortir de mon appartement et me retrouver dans la rue. Le suicide est-il un motif de santé ? Sauter par la fenêtre est-il un déplacement bref lié à l’activité physique individuelle ?
C’est que je voudrais mourir avec honneur... hors de question de faire une fausse déclaration.


***


Éric Chevillard entame aujourd’hui une chronique (dont l’intégralité est évidemment... réservée aux abonnés) sur le confinement pour Le Monde. Je vois qu’il y cite, fort à propos d’ailleurs, Voyage autour de ma Chambre de Xavier de Maistre.
Je pensais que personne ne se rappelait ce court roman. Personne à part moi.
Ce roman, d’ailleurs, j’y fais plusieurs allusions dans Humeurs, texte dont l’unité de lieu est justement... ma chambre...
Comment Éric Chevillard a-t-il eu accès aux brouillons de Humeurs, je me le demande... mais cette affaire confirme mes soupçons.

jeudi 19 mars 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (4)

Preuve que le confinement change nos habitudes, voilà que le tant attendu billet dessin / peinture / production graphique arrive un jeudi et non un mercredi...

J’ai eu tout le temps d’achever mardi après-midi cette petite huile inspirée (qui a dit pompée / copiée / piquée / plagiée ?) d’un bas-relief vu au Louvre lors de ma dernière visite - il y a déjà près de deux semaines : une éternité.... Pour le titre, je ne me suis pas foulé même si, au départ, je voulais l’intituler « Pas une fable de La Fontaine ».

Premier jour de confinement
(18 x 24 cm)

Musée du Louvre - Antiquités du Proche-Orient

mercredi 18 mars 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (3)

Mon dévouement n’ayant d’égal que mon génie, j’ai décidé de mettre le second au service du bien de tous et d’occuper le temps où je suis confiné chez moi à la plus noble des causes actuelles : trouver un remède au coronavirus.

Je ne possède cependant pas de matériel de pointe - je n’habite pas l’Institut Pasteur. Je m’en suis donc tenu aux remèdes de grand-mère...

J’ai donc sorti une bouteille de pommeau de ma réserve personnelle...
Premier verre : aucun symptôme n’apparaît... ça parait efficace... je tiens peut-être la solution...
Deuxième verre : il vaut mieux ne pas prendre de risques, trop vaut toujours mieux que pas assez...
Troisième verre : le, euh, pommeuh, pommou, pommeau... c’est quand même pas mal comme médoc... c’est meilleur que le... le... le... le truc, là, quand tu te chies dessus... éééééhhhhh, vous vous rap’lez la dernière fois où j’me suis fait d’sus d’sous... ah, merdeuuuuuhhhh, je l’avais raconté à personne... non personne... zut... ah ouais, euh, où j’en étais, d’jà ? Ah oui, le snecta... le specra... le recta... oui, c’est ça, le smecta, c’est dégueu, ça le smecta... pas comme le popo, poto, pono, polo, pomooooooooo...
Quatrième verre : aucune idééééée... efficace contre le coro-machin-truc... que c’est les chinois... ils nous l’ont balancé... leur soupe de margoulin... bouffent nawak les chinois... savent pas boire... ou c’est les russkofs... d’ailleurs y sont pas malades là bas, c’est louche... y’a un truc pas net... mais ils boivent les poutineux... au moins...
Cinquième verre : bref, je sais pas si ça marche comme remède, le pommeau... mais j’en ai rien à foutre... le pommeau, ça fait du bien !


***


Ne pas faire de stocks !
C’est le Ministre de l’économie - bien qu’on l’appelle Mr Le Maire - qui nous le dit.
Il n’y a pas et il n’y aura pas de pénurie dans les magasins d’alimentation.

Respecter cette consigne, c’est comme respecter la distance de sécurité sur l’autoroute, il y aura toujours un connard pour s’intercaler et faire risquer un accrochage...

J’ai donc fait des stocks moi aussi... mais après tout le monde... il n’y avait déjà plus de pâtes ni de riz ni de conserves de légumes ni de packs d’eau... tant pis, je me suis rabattu sur le caviar, la vodka, le champagne, les escargots et les noix de saint Jacques surgelés... ça va être sympa, ce confinement, finalement.


***


Et si je profitais de la quarantaine pour mettre en route un grand projet que j’ai en tête depuis un moment... Écrire un nouveau roman ? Peindre une nouvelle toile ? Composer une sonate pour piano  ? Non : rédiger ma fiche Wikipédia...

mardi 17 mars 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (2)

A-t-on totalement écarté la possibilité - l’a-t-on même envisagé, cette possibilité ? - que le coronavirus soit un virus informatique ?

Je serais le gouvernement, je ne prendrais pas de risque...
Après avoir fermé les lieux d’éducation, fermé les lieux de loisir et interdit aux gens de circuler, de sociabiliser et les avoir enfermés chez eux, je couperais désormais Internet... Principe de précaution. Et coupons aussi les réseaux de téléphone portable. Sait-on jamais.


***


Et si la crise du coronavirus était un complot mondial ?
Un complot destiné à laisser plus de temps à Maurice L. Maurice pour poursuivre son Œuvre - oui, la majuscule est appropriée - et à le forcer à y travailler, à son Œuvre - oui, la majuscule est appropriée - en l’enfermant chez lui ?

Cette ambiance anxiogène n’aura pas servi à rien puisqu’elle lui aura inspiré plusieurs billets... alors même qu’il se sentait, il y a quelques jours encore, en panne d’inspiration...


***


Maurice L. Maurice a bien de la chance. C’est un auteur fictif, il est un personnage de ses propres écrits. Et, en tant que personnage inventé, il n’a pas de conscience...
Ainsi, il peut sans crainte balancer des plaisanteries sur le coronavirus... même si l’épidémie devient sévère et faits des milliers, des millions, des milliards de morts, il n’éprouvera aucun remords...

lundi 16 mars 2020

En Direct de chez Maurice Confiné (1)

Ça y est, c’est le chômage technique, en attendant le confinement, la quarantaine... Des semaines, peut-être des mois à la maison. Il va falloir trouver de quoi s’occuper. Je n’ai heureusement pas ce genre de difficultés, je trouve toujours quelque chose à faire. J’ai beaucoup de projets de peinture et d’écriture en retard, je vais pouvoir avancer.
Et au pire, j’ai beaucoup de livres, films et disques à regarder, écouter et lire - par forcément dans cet ordre. Quelques propositions pour passer le temps :

Films :
Contagion de Steven Soderbergh
Alerte avec Dustin Hoffman
L’armée des douze singes avec Bruce Williiiiiiiisssss

Livres :
La Peste d’Albert Camus
Le Hussard sur le Toit de Jean Giono
Virus de John Brunner

Groupes à écouter :
Anthrax - se rappeler la psychose de 2001
The Cure et The Vaccines parce qu’il faut aussi savoir espérer

J’attends vos propositions...

***

Crise de l’anthrax. Crise du H1N1. N’a-t-on jamais appris à nos dirigeants qu’à force de crier « Au loup ! Au loup ! » on finit par ne plus être écouté ?
De si gros moyens mis en œuvre pour une maladie, le coronavirus, qui semble bénigne dans la majorité des cas... Quand sévira l’épidémie qui transforme les humains en zombies (cf. les documentaires 28 jours plus tard ou Shaun of the Dead), personne ne la prendra au sérieux... et ça fera des dégâts.

***

Enfin, j’aimerais signaler que jusqu’à ce jour, aucun lecteur de MLM n’a chopé le coronavirus... Je dis ça, je dis rien... passez tout de même le mot à ceux qui vous sont chers... il vaut mieux mettre toutes les chances de son côté.

dimanche 15 mars 2020

En Retard (39)

Le doyen du wagon, plus expérimenté en matière de temps qui passe que n’importe quel usager présent, constatant que personne ne se bouge pour remettre le temps en route et les pendules à l’heure, se lève. Se redresser ainsi depuis son siège semble lui être aussi pénible physiquement qu’intellectuellement agréable. Il sait que c’est son moment. Il en profite. Il savoure. Il en jouit d’avance.
Toute l’attention se braque sur sa haute (bien que voûtée) stature. Il ignore son public. Son public lui est égal. Du moins, c’est ce qu’il veut faire croire. Il feint l’indifférence. Feint de ne pas rechercher la gloire. La fausse modestie est la plus grande mais aussi la plus louée des arrogances.
Ses yeux ne quittent pas les miens. Ses lèvres se déforment lentement. Sourire ou grimace, je ne saurais dire. Je suis soumis au même suspense que le reste des spectateurs présents. Je ne maitrise plus le cours des événements. Ce qui va se passer est une complète surprise.


Soudainement, il tourne la tête, regarde sa femme - nul doute qu’il s’agisse de sa femme ou, du moins, de sa compagne de longue date, les vieux couples finissent par tant se ressembler qu’on pourrait les prendre pour de faux jumeaux - à moins qu’il ne s’agisse de sa sœur jumelle, assise sur le siège en face du sien. Dans un mouvement d’une rapidité dont on ne le soupçonnerait plus capable, il lui décoche une gifle d’une violence inouïe - violence dont on ne pourrait le croire non plus capable - qui envoie mamie rejoindre ma jeune « victime » au sol.

samedi 14 mars 2020

En Retard (38)

La rame s’arrête au milieu du tunnel. Les derniers échos de grincements et de frottements s’éteignent au loin.

Le silence est parfait. Pesant. Éternel. Immobile. On pourrait presque entendre les regards incrédules échangés entre les passagers.

Le temps lui-même semble attendre que quelqu’un réagisse pour reprendre son cours.




J’en étais là, ce soir, vendredi, quand le téléphone a sonné... En Retard est rattrapé par le présent.
Je n’ai plus envie d’essayer d’être drôle ce soir. Peut-être aurai-je plus le cœur à ça dimanche après-midi.

vendredi 13 mars 2020

MeToo

Et si, pour éclairer d'un jour nouveau l'oeuvre désormais foisonnante de Maurice L. Maurice - voilà que je parle encore de moi à la troisième personne - l'auteur levait le voile sur son plus grand secret et admettait enfin qu'il n'est pas un représentant du patriarcat misogyne. Oui, il est grand temps pour MLM de s'assumer et de hurler à la face du monde sa fierté... d'être une femme - c'est beau comme du Sardou.
En Retard, surtout dans ses récents développements que l'on pourrait penser rétrogrades, prend alors des couleurs sarcastiques qu'on ne lui soupçonnait pas, certains passages de TOC et de L'Appeau de Banane se teintent d'une ironie invisible à la première lecture, Dring n'en est que plus déchirant, l'ensemble des poemlm se révèle plus politique que jamais...
Oui, toute l'oeuvre de MLM soudain devient un véritable manifeste féministe... ce qui devrait lui apporter de nouveaux lecteurs et surtout de nouvelles lectrices, bien plus nombreux(ses) que ceux qui, suite à cette révélation, abandonneront sa lecture pour rejoindre les rangs houellebecquistes - ce n'est pas une grande perte...


Il est effectivement temps de l'avouer : Maurice L. Maurice en réalité s'appelle Mauricelle Maurice.

mercredi 11 mars 2020

03/03/2020

Lorsque je vous ai présenté le dernier gouâchis en date de la série Sans Autre But, j’ai écrit qu’il ne constituait que la moitié d’un diptyque dont l’autre moitié restait à produire - quelle lourdeur dans la formulation...
Je savais dès le départ que cette seconde moitié serait basée sur une photographie. J’ai, en revanche, longuement hésité entre plusieurs photos qui me plaisaient. Longtemps également hésité à me lancer - j’ai toujours énormément de mal à démarrer un nouveau projet, encore plus à me freiner pour ne pas, une fois que je me suis lancé, le finir trop vite et le bâcler - longtemps tergiversé. Et finalement, près de deux mois plus tard, mardi 03 mars, je me suis décidé. Pour la photo... et à me mettre au bouleau.
Trois ou quatre heures de travail (presque) intensif pour un résultat... qui me satisfait pleinement (pour le moment)... ça valait le coup d’attendre.

Sans Titre (pour le moment)
(14 x 14 cm)

mardi 10 mars 2020

Antonymes

Il faut vraiment être écrivain pour comprendre que le contraire de « être imprimé », c’est « être déprimé ».

lundi 9 mars 2020

VU & Nico

Mon reflet dans le miroir a bien de la chance : il me voit sous mon meilleur profil.

Tandis que moi, je suis obligé de me contempler sans dessus-dessous et, la plupart du temps, sans fond de tain.

dimanche 8 mars 2020

En Retard (37)

On ne peut en rester là. Je ne peux en rester là. Faire comme si de rien n’était.

Un réflexe. Réaction incontrôlée. Irréfléchie. Inattendue. Venue de nulle part. Instinctive.
Si j’avais réfléchi aux causes et aux conséquences de mon geste, je suis cependant à peu près certain que j’aurais agi de la même façon. Il faut parfois savoir rester naturel. Nul besoin de plan préétabli, nul besoin d’anticiper quand on a la certitude d’être authentique, d’être sincère, en accord avec ce que l’on est profondément... Il faut savoir se faire confiance...

Bref, je lui colle une gifle. Une claque. Une tarte. Une taloche. Une mandale.
Une seule. Je ne m’acharne pas. Je me contiens. Une unique torgnole. Mais du genre de celles dont elle se rappellera. Qui lui laissera une marque plusieurs jours durant sur la joue. Et plus longtemps encore dans ses souvenirs.
Qui la renverse de son siège et l’envoie rejoindre au sol le bouquin avec lequel elle me narguait il y a quelques secondes encore.

Stupeur dans la rame. Silence immédiat.
Tous les passagers cessent. Leur conservation, leur lecture ou leur quelconque occupation. Tous me regardent. Regardent la jeune femme qui ne s’est pas encore relevée et ne semble pas réaliser ce qu’il vient de lui arriver. Se regardent entre eux. S’interrogent les uns les autres, sans un mot : qui aura le courage d’intervenir ?

samedi 7 mars 2020

En Retard (36)

Ma technique d’approche, mes orteils enchaussettés caressant la cheville de la jeune femme, se révèle redoutable d’efficacité. La jeune femme relève la tête. Ses yeux abandonnent le livre qui encombrent ses mains, se dirigent vers ma personne, doucement s’écarquillent. Elle me dévisage, elle m’envisage - ce n’est pas du Paradis... Elle me scrute, me reluque, me mate, me détaille. Elle me jauge, me décortique, m’inspecte, me dissèque, m’ausculte.
Ses yeux semblent trembler - l’émotion ? Sa bouche sans un cri s’ouvre grand - l’émerveillement ? Son livre, vernis de culture, glisse de ses mains vernies et tombe au sol vert-gris - quel grand poète je suis. Elle ne peut plus détacher son regard de moi - l’ensorcellement ?


Un haut-le-cœur la prend soudainement. Sa main droite (opportunément libérée de son Musil) se place devant sa bouche, comme pour retenir un flot de bile... qui ne viendra pas.



Ainsi, c’est ce que je lui inspire... le dégoût.


Je ne suis certes pas très présentable aujourd’hui avec mon orteil fraîchement amputé, mon doigt égaré, ma toge de plastique bleu constellé des restes de mon repas de la veille, mon pantalon plein de tâches de sang et de traînées de poussière... mais, tout de même, pour qui se prend-elle pour ainsi juger mon apparence et me juger sur mon apparence ?
Je ne suis pas qu’un corps, je ne suis pas qu’un extérieur - et, n’allez pas croire, je n’ai aucunement honte de mon image, quand je me regarde, je me force à ne voir que de la beauté, je suis pleinement dans une acceptation comblée de positivité vis-à-vis de ce que je suis et renvoie - je suis aussi un cœur et une âme et un esprit et un intellect, j’ai des pensées, des sentiments, des rêves et des fêlures. Je mérite autant que tout autre d’être aimé et respecté et accepté et consolé.

Montrer ainsi le dégoût que nous inspire son prochain n’est plus tolérable aujourd’hui... L’attitude de la jeune femme à mon égard est digne d’un autre siècle. Honteuse. Scandaleuse. Criminelle - oui, j’ose le dire.
Tant de luttes pour l’égalité des sexes pour en arriver là ? Pour que la seule réponse à celui qui veut sociabiliser et plus si affinités soit l’envie de vomir et qu’on ne s’en cache même pas ? Quelle infâme rétrograde...

vendredi 6 mars 2020

Au Louvre


La lecture, parfois, est un frein à la culture générale. La lecture peut être source d’erreurs.
Ainsi, à cause d’un livre de poche (acheté chez Maxi-Livres, du temps où l’enseigne semblait plus que vivoter et publiait ses propres éditions de poche), je ne peux m’empêcher de penser que la toile de Géricault ci-dessus reproduite (photographie personnelle réalisée hier) s’intitule « Le Colonel Chabert ». C’est pourtant un Lieutenant qui est représenté ici...
Ceci dit, « Le Colonel Chabert » serait un meilleur titre que le bien trop long « Officier de Chasseurs à Cheval de la Garde Impériale Chargeant » choisi par Théodore...
Ceci dit (bis), je n’ai même pas lu Le Colonel Chabert, de Balzac. Le livre de poche doit encore traîner, inviolé, chez mes parents.


Dis, Maurice, tu ne voudrais pas un peu lâcher ton piano et t’occuper de moi ?
Je suis lasse de ces musiciens frustrés qui me négligent...

jeudi 5 mars 2020

En quatre ?

Chez le coiffeur :
- Comment on les coupe aujourd’hui ?
- Qu’est-ce que j’en sais moi ? Avec des ciseaux, je suppose... et puis, chacun son métier... je ne vais pas vous apprendre le votre... c’est bien pour ça que je vous paye, non ? Je ne vous demande pas, moi, ce que je vais écrire demain...





À chaque fois que je sors de chez le coiffeur, je trouve que j’ai une tête à chapeau...

mercredi 4 mars 2020

Çiva

Le soir du dernier jour (le vendredi) de notre séjour en Bretagne, j'ai réalisé une nouvelle petite toile (à l'huile, donc) de la série Expérience CD avec les restes de peinture de ma palette. Le résultat ne m'a pas emballé du tout. Ramener une huile de Bretagne dans la voiture n’étant pas forcément évident (risques non négligeables d’étaler des couleurs partout), j’ai décidé de mettre à la poubelle cet essai qui aurait pu être le numéro 9. Élimination libératrice.

J’avais raconté il y a peu que j’étais peu satisfait de mon Expérience CD #7. Je l’ai donc détruite à son tour. Cette fois cependant, en économisant le support : je l’ai intégralement recouverte. Ce qui a donné Expérience CD # 7bis.
J’ai en revanche un peu triché en ne respectant pas deux règles propres à la série Expérience CD :
- peu d’improvisation ici : le résultat ressemble à ce que j’avais en tête en commençant.
- je n’ai pas utilisé que des restes de peinture mais ai repris de la peinture dans les tubes pour pouvoir finir.


Expérience CD #7bis
(10,5 x 14,5 cm)

mardi 3 mars 2020

Post-scriptum

Le talent, quoi qu’en dise la profusion de célèbre fils et filles de dans le cinéma, la musique, la littérature ou même les sciences, n’est pas contagieux... Le coronavirus l’est. Aucun rapport croyez-vous ?

Pourtant, le coronavirus pourrait bien effectivement faire de moi le meilleur pianiste du monde... ça ne dépend que de l’ampleur de la pandémie...

lundi 2 mars 2020

Le Piano de MLM (11)

Il faut d’ailleurs que je l’admette, m’entendre jouer sur un véritable piano - complet avec cadre, coffre, cordes, pieds et pédales - se révèle fort décevant. Quand je joue des œuvres que pourtant je maîtrise, connais sur le bout des doigts - c’est l’occasion ou jamais d’utiliser cette expression galvaudée - depuis mes plus jeunes années, comme les Impromptus de Schubert ou Sur un Sentier Recouvert de Janáček (très beaux diacritiques chez Leoš également) sur un piano complet, elles ne se ressemblent pas... elles ne ressemblent en rien à ce que j’ai en tête quand je les joue sur ma palette. Et je ne parle même pas de mes propres compositions...
N’avoir joué que sur ma palette sans me soucier des limites techniques actuelles de la facture de piano m’a mené bien trop loin. Je suis trop en avance sur mes contemporains. Les pianos actuels ne peuvent supporter mon jeu. Ni physiquement ni émotionnellement. Les pianos actuels semblent se désaccorder aussi vite que j’en joue, les cordes semblent en permanence au bord de la rupture ou, au contraire, de la totale distension, le bois semble sur le point de se fendre, d’éclater, les pédales cherchent en vain à me freiner. C’est une véritable torture à écouter... je pourrais croire, en m’entendant jouer, que je me contente de frapper les touches au hasard ou sans savoir ce que je fais - quelle ironie...
Il faudra probablement quelques années ou décennies encore avant que ne soit construit un piano capable de me suivre, de supporter la charge fantastique de mon jeu. En attendant, je me contente de ma palette.

Il m’arrive tout de même, de temps à autre, d’essayer un piano récent. Je garde, au fond de mon âme, un vague espoir - je suis un éternel et indécrottable optimiste - d’en trouver un qui rendra justice à ma musique et à ma musicalité.
Je me rends dans ce but dans des boutiques spécialisée. Où peu de temps s’écoule avant qu’un des vendeurs, honteux des instruments indignes de mon talent qui y sont proposés, ne me prie de quitter les lieux et d’aller jouer ailleurs.

Je continue de chercher et d’être déçu.

Hier encore, alors que j’assistai (sans avoir été invité) à une party dans un immense appartement au dernier étage d’un immeuble hausmannien, après que j’ai en vain tenté de lui imprimer la Lettre à Élise, un Steinway a préféré sauter par la fenêtre.


VEV, février 2020

dimanche 1 mars 2020

En Retard (35)

Toute entreprise n’a d’intérêt que si sa réussite n’est pas écrite d’avance. Le risque, le doute, la crainte de l’échec sont ce qui en fait tout le sel. La drague ne fait pas exception.

J’aimerais apprendre la timidité. J’aimerais ne pas savoir comment aborder les femmes. J’aimerais ne pas oser dire les femmes mais dire niaisement les filles. J’aimerais me tortiller ridiculement dans mon coin en attendant qu’elles fassent le premier pas vers moi. J’aimerais manquer d’assurance. J’aimerais que mes tentatives de séduction soient pleines de bafouillages et de compliments maladroits. J’aimerais trembler quand une fille me parle. J’aimerais ne pas être un tombeur.
J’aimerais quand j’aborde une personne du sexe opposé - il faudrait que j’essaye de draguer d’autres hommes, peut-être alors aurais-je (un peu) moins de succès et trouverais-je le frisson, l’excitation qui récompenseraient mes efforts - ne pas être certain qu’elle va succomber.
Ce n’est malheureusement pas le cas. Je suis - ce n’est pas pour me vanter, c’est un fait objectif - irrésistible. Toutes les femmes que j’ai accostées dans la rue ont eu le bonheur de coucher avec moi dans la demie-heure qui a suivi. Toutes m’ont assuré qu’elles n’avaient jamais pris autant de plaisir qu’avec moi. Et ça ne m’a jamais coûté plus de cent euros...

Malgré mon retard, j’ai un peu de temps à tuer pendant que je voyage dans ce métro. Autant  le mettre à profit, autant l’occuper, ce temps de transport, avec une nouvelle conquête, cette jeune femme qui fait semblant de préférer la lecture aux échanges humains.

Pour lui montrer que je ne suis pas dupe de son petit manège, je lui caresse la cheville du bout du pied - le gauche, celui qui a encore tous ses orteils, je sais être galant - et ,quand elle relève la tête, je lui adresse un clin d’œil et, d’un signe de tête, lui montre la bosse dans mon pantalon - j’admets, je triche un peu : mon érection n’est due qu’à mon récent réveil, ma Morning Glory n’a pas d’heure.