samedi 30 novembre 2019

En Retard (11)

Je descends les marches trois à trois. J'aurais aimé être capable de les descendre cinq à cinq ou, mieux, sept à sept. J'aurais gagné énormément de temps à les descendre cinq à cinq ou sept à sept ou onze à onze. Je ne suis malheureusement pas assez entrainé pour une telle performance, franchir cinq ou sept ou onze ou treize marches d'un seul bond, surtout sur une seule jambe - malgré mes indéniables capacités physiques et sportives, je ne suis pas champion de marelle. Quant à les descendre deux à deux ou, comme le suggère l'idiotisme, quatre à quatre, c'est évidemment hors de question, je ne l'envisage même pas.
Dans la précipitation de ma vertigineuse descente, arrivant au palier de repos, là où l'escalier forme une sorte d'épingle à cheveux, je ne suis pas loin de m'écraser le visage - seule partie de ma sublime anatomie épargnée par Ginette - contre le mur d'en face. Comment le fait que l'escalier est organisé par volées de dix-sept marches - alors même que ce nombre est la raison principale qui m'a décidé (malgré les murs humides et l'odeur permanente de marécage) à louer un appartement dans cette cage d'escalier de cet immeuble - a-t-il pu m'échapper, me sortir de l'esprit, cela reste un mystère... toujours est-il qu'à les descendre trois à trois, une marche manque pour pouvoir garder le rythme tout le long... et cette marche manquante, je l'ai clairement ratée...

J'invite ceux qui, parmi mes fidèles - mais également, parmi mes plus récents - lecteurs, n'ont pas compris un traitre mot aux motivations des paragraphes précédents, à lire, relire voire (re)relire TOC (1 2 3 4 5 6 7) texte écrit (et publié) dans la précipitation alors que mon travail sur En Retard prenait trop... de retard. En effet, je comptais initialement commencer à proposer En Retard dès le mois de juin dernier... avant de réaliser que le texte n'était absolument pas prêt. Quelques mois plus tard, je n'ai guère plus avancé sur En Retard, je ne suis toujours pas prêt à le présenter (je suis donc obligé d'improviser de semaine en semaine, de faire, parfois, du simple remplissage à partir de peu)... mais TOC peut être, d'une certaine façon, considéré comme faisant partie intégrante du projet.

vendredi 29 novembre 2019

Mon noM (1)

mon nom se prononce comme il s'écrit


mon nom ne s'écrit pas comme il se prononce


mon nom ne se prononce pas, il s'écrit

jeudi 28 novembre 2019

Remords

Je ne peux m'empêcher, après avoir tenu la porte à une personne qui me suit, après avoir aidé une personne âgée à traverser la rue, après avoir cédé ma place dans le bus à une femme enceinte, après avoir fait l'aumône à un mendiant, après avoir accepté d'échanger mes heures avec un collègue, après toute bonne action, après tout geste de solidarité de ma part, de me sentir mal, honteux... j'éprouve de réels remords en m'imaginant que tous ces gens vont penser de moi que je suis une personne gentille et serviable... alors que c'est par inadvertance, par faiblesse, que j'ai été, pendant quelques instants, humain, généreux ou arrangeant... et, non, ce n'est certainement pas l'image que je veux donner de moi. Qu'on se le dise, au fond de moi, je n'aspire qu'à une chose : être un connard, un salaud, une crapule, une raclure.

mercredi 27 novembre 2019

Fond de tiroir

On attaque les fonds de tiroir... je n'ai plus grand chose à proposer en peintures ou dessins : ma production en la matière est trop peu importante actuellement.
Voici un gouâchis censé être préparatoire à une toile. Près de dix-huit mois après avoir réalisé celui-ci, je n'ai toujours pas imaginé une façon d'animer ces bâtiments qui semblent bien mornes... et la toile est restée à l'état de projet... il ne faut cependant désespérer de rien, certains projets ont attendu bien plus longtemps (et ont même fini, en tout cas pour l'un d'entre eux, par rejoindre une collection privée !)...
Et puis ce gouâchis n'a pas servi à rien, j'ai utilisé mon traitement de l'eau (fortement inspiré de Maurice Denis) dans un autre gouâchis, qui lui a abouti à une toile...

Le Moulin de la Mie
(24 x 32 cm)

mardi 26 novembre 2019

D'pès un mésvntu (éll) d Ntch

J'i tnté d nttoy mon clvi d'odintu t ç s'st ml pssé... ls touchs du , du , du  t du  n fonctionnnt plus, j compnds ps pouquoi. Pouv-vous m'id ?

lundi 25 novembre 2019

En Retard (10)

Ainsi, c'est la simple vue d'une verge d'une taille pourtant fort ordinaire (voire plutôt en dessous de la moyenne d'après ce que j'ai pu en juger sous les douches de mon club de polo (et encore, les chevaux sont lavés ailleurs)) qui provoque chez mamie - je dis mamie avec toute l'affection possible pour les personnes du troisième et quatrième âges, n'y voyez ni jeunisme ni mépris - Ginette, elle qui pourtant peine à monter les marches jusqu'à notre commun premier étage, un tel regain d'énergie et lui inspire vulgarités et volonté de faire souffrir. On en découvre tous les jours sur les gens, il ne faut plus s'étonner de rien : Gigi est adepte de l'amour (comprenez sexe - je n'ose pas toujours appeler les choses par leur nom) violent.
Stupéfait par cette révélation, j'entrevois aussitôt, en pensée, caché dans ce qu'on pourrait croire, porte fermée, un placard à balais, tout l'attirail de Gigi - devrais-je l'appeler plutôt Maîtresse ? - menottes, fouets, cuirs, latex, martinets, pinces, cravaches, baillons, sangles, cordes, que sais-je ? et je l'imagine, amazone toute de rouge cuir vêtue, distribuer réprimandes et punitions, cracher au visage de ses esclaves-amant(e)s - je hais l'écriture inclusive, je la trouve laide et moche et pas belle et hideuse, une véritable agression pour les yeux, je préfère les parenthèses - les humilier, les insulter, les frapper et, pourquoi pas ?, les pénétrer au moyen de formes oblongues et de cylindres si longs qu'ils sont les seuls à...

pourquoi, quoi que je dise ou écrive ou lise ou fasse,
des titres ou textes de chansons me viennent à l'esprit ?
on aura reconnu ici Alain Bashung, Madame Rêve.


Comme tout écrivain non lu qui pourtant s'échine, nuit et jour, en vain, à remplir des pages et des pages, je suis forcément, quelque part, même si je n'ose me l'avouer, un peu masochiste. De plus, la raclée que je me vois administrée me rappelle bien des voluptés de l'enfance... et je commence à avoir du mal à contenir une érection... bandaison récompensée par Maîtresse Gigi d'une nouvelle flopée d'insultes et d'un redoublement des impacts de canne sur mon corps déjà bien fourbu.


Je suis malheureusement en retard, très en retard. Mon sens du devoir - j'ai toujours fait passer mes obligations avant le contentement de mes sens - n'ayant d'égal que mon respect de la parole donnée - j'ai promis que ce texte ne serait pas érotique - je réprime mes envies de coït et de jouissance avec une femme d'une si grande expérience et profite d'un léger affaiblissement de Ginette, d'un léger ralentissement dans le rythme de ses frappes - ceux qui l'ont connu du temps de sa jeunesse, il y a quelques lustres de ça, lorsqu'elle pouvait maintenir un rythme soutenu des heures durant ont dû parvenir à des niveaux de plaisir inaccessibles aux pauvres habitués du missionnaire tels que moi - pour ranger mon organe à présent bien dur derrière la fermeture-éclair (j'échappe de peu à la circoncision) me relever et me lancer (toujours à cloche-pied) dans les escaliers.

dimanche 24 novembre 2019

En Retard (9)

Moment d'hésitation. Silence malaisant. Gênant blanc.

Ginette change de visage et décide subitement de me montrer l'étendue de son vocabulaire charretier Maquereau ! Malotru ! Pervers ! Forniqueur ! Sodomite ! Dépravé ! et la vigueur de ses coups de canne.
Un coup de pommeau sur la tête, un second dans les côtes et un troisième sur le genou gauche me font rapidement perdre l'équilibre. Précipité au sol, à la merci de la bastonnade de Gigi qui semble à chaque instant redoubler de force et accélérer le tempo, je parviens tout de même à me recroqueviller en position fœtale dans un angle de la cage d'escalier. Tout en tentant maladroitement d'échapper au hêtre qui s'abat sur mon dos, mes avant-bras et sur mes tibias, je cherche à comprendre ce qui peut bien avoir provoqué une telle excitation chez cette mamie - je dis mamie avec toute l'affection possible pour les personnes du troisième et du quatrième âge, n'y voyez ni mépris, ni jeunisme - habituellement plutôt peu expressive (Bonjour / il fait beau aujourd'hui / c'est devenu cher, le poulet / (diverses remarques racistes) / bonne journée - et c'est à peu près tout).
Malgré mon attention détournée par les jurons - j'aimerais en noter quelques-uns, particulièrement fleuris, mais je ne suis pas dans les conditions idéales pour sortir mon carnet - et par la volée de bois sec et raide sur mes abattis que je n'ai pas même songé à numéroter, je ne tarde pas à m'apercevoir que, dans mon empressement à combler mon retard - qui s'accroit sévèrement, au fur et à mesure que les hématomes se forment sur ma peau - j'ai oublié de fermer ma braguette et, surtout, oublié d'enfiler un caleçon. Torts partagés, cher lecteur, si tu avais été plus attentif lors de ta lecture - comme j'aurais dû l'être lors de l'écriture - et ne t'étais pas laissé emporter par mon rythme effréné, tu aurais alors pu me prévenir que j'oubliais un élément à ma tenue, au second numéro de ce récit.

samedi 23 novembre 2019

En Retard (8)

Bonjour.

Une voix dans mon dos me coupe dans mon élan alors que je viens de claquer la porte (ai-je pensé à prendre les clefs ? à vérifier plus tard) et m'apprête à dévaler trois à trois les marches des escaliers. Mes parents m'ayant inculqué - à grand renfort de coups de fouet, de martinet et de ceinture, de gifles, de fessées, d'oreilles tirées et de coups de règle sur les doigts, de douches glacées puis brûlantes puis glacées puis brûlantes etc., de privations de dessert et d'obligations de finir mon assiette de blettes (la pire des punitions), bref, à grand renfort  de toutes sortes de châtiments corporels et psychologiques et de bon vieux temps où l'on pouvait éduquer un gosse proprement et dans les règles de l'art sans avoir douze douzaines (une grosse) d'associations d'aide et de protection de l'enfance (putain de hippies et de soixante-huitards attardés) sur le dos - les notions élémentaires de politesse, je ne peux poursuivre mon chemin comme si de rien était et ne pas tenir compte de ce bonjour. Je me retourne donc pour faire preuve des obligatoires et habituelles hypocrisies et perdre par la même occasion quelques minutes supplémentaires en vaines palabres.
Face à moi, ma voisine de palier, la très respectable et néanmoins étonnamment sympathique nonagénaire (les jours où il ne pleut pas et où ses rhumatismes ne la font pas souffrir le martyre, elle paraît dix ans de moins) connue sous le sobriquet de Ginette, très souvent raccourci en Gigi - rien cependant n'interdit de penser qu'elle s'appelle en réalité Simone, Jeanine, Angèle, Polymnie ou Marie-Liesse, les gens se choisissent parfois des petits noms pires que leur état civil original... j'ai bien, moi-même choisi pour pseudonyme Maurice ; Maurice est mon nom et mon prénom, je me fais appeler Maurice L. Maurice, MLM pour aller plus vite. Me répéter ne me fera pas aller plus vite.

Bonjour. Comment allez-vous ce matin ?

Je réponds à la formule passe-partout (qui se soucie réellement que son voisin ou son collègue passe une bonne journée ?) de ma voisine par la formule identique (situation somme toute très courante dans les inutiles conversations quotidiennes) et y ajoute une autre formule passe-partout, qui, rappelons-le, est étymologiquement scatologique.

vendredi 22 novembre 2019

L'écrasante majorité de tous les autres

Homme, blanc, occidental, hétérosexuel, athée, apolitique, diplômé, fonctionnaire, de la classe moyenne, sans voiture, sans enfant, en relativement bonne santé, je fais partie de la moins enviable des minorités : celle constituée des rares personnes au monde à qui personne ne reconnaît le droit de se sentir ou de se revendiquer discriminé pour quelque raison que ce soit.




dernière modification : 23/11/19 à 17h15

jeudi 21 novembre 2019

aplusbéégalix

Mes textes sont très mathématiques : il faut y lire en priorité les parties entre parenthèses.


J'accouche de nombre de mes textes après de longs et difficiles calculs mentaux que je m'inflige comme d'autres s'infligent des calculs rénaux.


Pourtant, tout ce que je souhaite, c'est que mes textes aient la limpidité d'une tautologie.

mercredi 20 novembre 2019

Figuratif

Inspiré (d'un détail) du tableau de Mondrian Barn near Duivendrecht vu lors de ma visite de l'exposition Mondrian figuratif au Musée Marmottan.
J'hésite encore pour le titre : Mon-tree-an ? Pietree ? Baumondrian ? Autre chose qu'un calembour pourri ? Est-ce que cette petite huile sans intérêt mérite seulement un titre ?

Baumondrian ?
(18 x 24 cm)



mardi 19 novembre 2019

ID 499

Mes meilleures idées - ce que je pense être mes meilleures idées - me viennent au lit, quand je ne parviens pas à fermer les yeux, que je me tourne et me retourne entre les draps et que mon esprit se met à divaguer, à partir en tous sens...
En ce moment, je manque d'insomnies...

lundi 18 novembre 2019

November

November
Sur une musique de Max Richter


Avoir attendu

Si longtemps attendu



Se lever

Sentir ses jambes faiblir
Et son cœur battre
Trop fort

Sentir sa volonté
S'évanouir

Trembler de peur
Et de froid
Et d'impatience

Inspirer
Expirer
Lentement
Bouche ouverte

Inspirer
Expirer

Inspirer
Expirer




Se tourner vers le chemin
Regarder le chemin
À parcourir
Si long

Fermer les yeux
Inspirer
Rouvrir les yeux
En expirant
Profondément

Fixer le chemin
À parcourir

Inspirer
Expirer






Faire un premier pas

Indécis
Incertain
Fragile

Se sentir tomber
Trébucher

Se ressaisir
Garder l'équilibre

Se mordre les lèvres
Jusqu'au sang


Faire un second pas
Puis un troisième
Un autre encore
Un autre
Et un autre
En se tenant au mur




Sortir

Devoir
Se confronter
À l'extérieur


Sentir son cœur battre
Plus fort encore
Et ses veines du cou
Se tendre
Comme prêtes à se rompre

Sentir ses mains s'agiter
Ne plus obéir

Et sa respiration s'accélérer

Serrer les poings
À s'en blesser les paumes

Inspirer
Expirer
Inspirer
Expirer
Avancer
Marcher
Marcher




Se mêler à la foule
En solitaire

Marcher

Accueillir
Les insultes
Et les éloges
Avec la même douleur

Marcher

Ne pas écouter
Ne pas croiser les regards
Ne pas écouter
Ne pas regarder
Ne pas écouter

Si possible

Marcher


Essayer d'ignorer les injures
Et les moqueries
Essayer d'ignorer les bravos
De la même façon

Sentir ses larmes couler
Ses dents claquer

Marcher
Continuer de marcher


Fendre la foule

Regarder droit devant
Marcher
Marcher sans s'arrêter
Marcher
Sans un regard
De côté


Utiliser la foule
Et ses hourras
Et ses crachats
Pour ne pas faillir
Pour continuer
De marcher

Marcher
Contre la foule
Et ses hourras
Et ses crachats



Marcher plus vite
Avoir envie de courir
De fuir

Se retenir
Marcher
Conserver
Le même rythme
Se réfréner

Rester digne


Se concentrer sur sa marche
Marcher


Ignorer la foule
Faire disparaître la foule

Ignorer les insultes
Ignorer les encouragements
Être sourd
Et aveugle
À la foule

Ne voir que le chemin

Marcher
Marcher
Inspirer
Expirer


Se sentir porté
Se sentir léger

Marcher
Pieds nus
Sans douleur


Sentir sa colère
Et ses doutes
Et sa haine
Et sa peur
Peu à peu
Fondre


Marcher
Marcher


Sentir son cœur
Et sa respiration
Retrouver leurs rythmes
Normaux
Habituels

Marcher
Marcher


Oublier ses devoirs
Oublier ses droits
Oublier ses besoins
Oublier ses envies


Oublier sa lâcheté
Oublier son courage


Être indifférent
À la foule

Ne plus voir
Ne plus entendre
La foule

Ignorer les présences
Comme les absences


Ne plus se sentir porté
Que par son propre élan

Marcher
Comme si plus rien
Ne pouvait plus arrêter
La marche


Sentir ses amours
Et ses joies
À leur tour s'éteindre

Et ses larmes sécher

Ne plus se sentir
Que vivant

Marcher


Regarder le chemin
Et se voir
Sans honte
Ni fierté

Sans regrets
Ni remords

Se voir et se savoir
Vivant


Marcher
Marcher
Marcher






Arriver à destination


S'arrêter
S'arrêter comme si la marche
Se poursuivait
S'arrêter dans le même élan
Que la marche



S'agenouiller



Poser sa tête sur le billot

Attendre l'office du bourreau

dimanche 17 novembre 2019

En Retard (7)

Reprenons.
Mon chat (je préfère garder le masculin même si c'est une femelle) tente de s'engouffrer derrière moi dans l'ouverture de la porte et de me suivre dans la cage d'escalier. D'un geste habile, rapide, habitué, je glisse mon pied sous le ventre rebondi - les chats d'appartement ne font pas assez d'exercice, le gras les transforme inexorablement en culbuto, les croquettes de régime, même rationnées, ne sont pas assez efficaces - de ma fauvette à tête grise et la repousse d'une pichenette savamment dosée qui l'envoie au milieu du salon, sur ses quatre pattes - aucun animal n'a été blessé durant l'écriture de ce texte.

Dans l'opération, ma chaussure droite, parce que je ne l'avais pas lacée, échappe à mon pied et, suivant une trajectoire similaire (mais non identique) à celle de ma féline compagne, va s'écraser contre le mur, juste sous le cadre d'une de mes estampes japonaises. Aller chercher ma chaussure me fera perdre quelques secondes et mon chat profitera de ma nouvelle tentative de sortie pour lui-même tenter une nouvelle sortie. L'histoire risque de se répéter, de bégayer, d'entrer dans une situation comique de répétition. J'aimerais vraiment avoir le temps pour cela, réécrire la même chose dix ou vingt ou cent fois de suite... mais je suis en retard. Je ferme la porte...
Je continuerai avec une seule pompe. Ce n'est pas pour me déplaire. Les chaussures sont de véritables instruments de torture. Quand elles ne provoquent ou ne favorisent pas la formation, l'émergence d'ampoules, d'oignons, d'échauffements, de coupures, de mauvaises odeurs ou de champignons, entre les orteils ou au niveau du talon, ce sont de petits cailloux qui s'y glissent et vous déchirent la plante du pied. Au moins, mon pied dextre sera épargné par les blessures et les morsures cordonnières. J'irai à cloche-pied.

samedi 16 novembre 2019

En Retard (6)

Vite ! J'enfile mes chaussures sans les lacer, comme si elles étaient des mocassins - qu'on ne se méprenne pas : je n'ai pas le mauvais goût de posséder, encore moins de porter des mocassins. Je ne vais pas m'étendre là-dessus - je n'ai pas le temps pour cela - mais je déteste les mocassins autant que les chemisettes. Je trouve les mocassins laids et ringards et absurdes, comme les chemisettes. D'ailleurs, qu'on se le dise : les porteurs de mocassins sont souvent également des porteurs de chemisettes et vice et versa.

J'enfile donc, sans les lacer, mes chaussures - me répéter ne me fera pas avancer plus vite, bien au contraire - ouvre la porte (de sortie) de l'appartement et me précipite sur le palier. Mon chat...

Minute... J'ai été un peu vite en besogne. Je n'ai pas assez travaillé le début de mon texte. Pas assez construit mon personnage. J'ai affirmé, quelques lignes, quelques paragraphes plus haut, mon plus strict célibat et une vie de solitaire endurci. Et je le pensais à ce moment du récit. À présent, je trouve plus judicieux car plus crédible, plus vivant, plus authentique, pour un personnage comme le mien, que je vive avec un chat. Un chat représente le parfait équilibre entre besoin de compagnie et volonté d'indépendance. Toujours présent tout en gardant ses distances. Oui, un chat serait le colocataire idéal pour celui que je souhaite paraître. Disons même, que j'ai une chatte, un chat femelle.
Maintenant que j'y songe, c'est même probablement elle (qui d'autre ? nous vivons (et passons nos nuits) seuls, à deux) qui m'a préparé le café à l'origine de la perte de mes capacités gustatives pour les huit jours à venir... Oui, c'est elle, assurément... J'ai bien fait de ne pas m'attarder sur ce texte, Le Café, de ne pas me lancer dans sa rédaction, il n'aurait pas été aussi intéressant que je l'espérais... Les notes que je n'ai pu m'empêcher de prendre dans le petit carnet qui jamais ne me quitte alimenterons les notes de bas de page d'une future réédition de En Retard.

vendredi 15 novembre 2019

Nouvelle Chevillardise (2/2)

Non, pas moi. Certainement pas moi. Je ne me mêle pas, moi, à cet accord majeur.


Dès que les lumières de la fosse s'éteignent, avant même que les vedettes du jour déboulent sur scène et que les premières notes pleines de distorsion du récital électrisé déraisonnent la foule surexcitée des spectateurs, je sors par la grande porte, montrant le plus ostensiblement possible ma complète indifférence, mon total mépris pour ce qui va suivre. Et je m'en vais déambuler des heures et des heures par les boulevards, incapable de lever la tête et de regarder autre chose que mes pieds (ce qu'on appelle du shoegazing ou du shoegaze) qui se mêlent alternativement aux reflets des réverbères sur l'asphalte, jusqu'à ce que je parvienne à reprendre mes esprits.

Ce ne sont pas les idoles bodybluesées qui me chamboulent, me tourneboulent, me bouleversent de la sorte ; ainsi que je l'ai dit, je pars avant même que les amplis ne se mettent à cracher leur infernal boucan. Le groupe, les chansons, les roulements du batteur, les soli du gratteux, les hululements et les raclements de gorge du braillard au microphone, l'ambiance de la salle, les vibrations de la foule, le jeu de lumières, la mise en scène du show, tout cela m'importe bien peu. Je ne suis pas là pour me saouler, ni de bière ni de son.

Moi, si je suis venu, c'est pour le véritable spectacle, le plus beau, le plus subtil, le plus authentique, celui qui se passe entre les différents sets. Sans me lasser, en fin connaisseur, je me délecte du travail des techniciens, des roadies comme on les appelle dans le milieu, qui entre les passages de deux groupes, installent et rangent le matériel et procèdent aux multiples vérifications nécessaires pour que le concert puisse avoir lieu sans souci.

Il faut les voir, sur les planches, les techniciens, les bras chargés, se frôler, se côtoyer, s'éviter, se rencontrer, se contourner, se croiser. Jamais ils ne se gênent  les uns les autres. Malgré la difficulté de la tâche, malgré le peu de temps alloué pour leur oeuvre, malgré l'exigüité des lieux, ils se déplacent sans jamais se couper la route, ils vont et viennent en tous sens sans se percuter. La chorégraphie est bien huilée, les trajectoires sont inventives : c'est un ballet saisissant, inoubliable pour qui sait y prêter attention.
Et encore, s'ils ne faisaient, sur cette scène, que se mouvoir comme autant de petits rats... Mais non, ils ne s'en contentent pas... pour rendre leur performance plus époustouflante encore, ils en augmentent la difficulté et s'encombrent d'engins dignes de la GRS.
Il faut les voir avec leurs câbles... comme ils les branchent, les débranchent, les rebranchent... des câbles de raideurs, d'épaisseurs, de longueurs, de couleurs, d'utilisations différentes... comme ils les déroulent, les réenroulent, les déploient, se les lancent les uns aux autres... comme les câbles semblent voler, s'envoler, atterrissent toujours à l'endroit souhaité, sans jamais se mêler. S'ils portaient mieux le justaucorps à paillettes, les roadies à coup sûr seraient champions olympiques, spécialité ruban.
Et comme si ce n'était pas encore assez, ils en appellent à d'autres domaines artistiques... ces morceaux d'adhésifs qu'ils sèment et collent partout... pour fixer, repérer, informer... avec des scotchs de différentes couleurs... des morceaux de tailles variées, déposés à droite, à gauche, en haut, en bas tandis qu'ils arpentent la scène... c'est digne de Mondrian préparant une nouvelle toile avec ses bandes de couleur...

Et, enfin, surtout, mon moment préféré. Celui qui a coup sûr m'arrache des larmes et des cris et des bravos (devrait-on dire des bravi ?) et des hourra et des bis... les test-son. Les musiciens feraient bien de plus souvent jeter une oreille à la musique de leurs techniciens.

Le batteur qui s'échine à imprimer la pulsation de son groupe n'arrivera jamais à la tribalité de son technicien qui, en quelques frappes sèches, isolées, violentes, accorde les fûts. Le chanteur qui pendant deux heures hurlera toute sa rage, toute sa frustration (le rock est la musique de la révolte et de la colère), a t'il conscience que le technicien qui a vérifié son micro a réussi, lui, avec ses onomatopées et ses monosyllabes à exprimer (sans qu'il y ait besoin d'y ajouter quoi que ce soit) toute la vanité et l'absurdité de notre société ?
Et a-t-on déjà vu un roadie se lancer dans un solo furieux et technique, pendant qu'il accorde les guitares ? Non, jamais. Il joue corde après corde, une seule à la fois. Doucement, lentement. C'est à chaque fois un éloge de la simplicité, un exemple d'anti virtuosité, c'est l'émotion de la musique à l'état pur, sans chichi ni démonstration... jusqu'à atteindre la note parfaite, la note exacte, la note juste... mi puis si puis sol puis puis la puis mi de nouveau... le reste n'est que superflu.

jeudi 14 novembre 2019

Nouvelle Chevillardise (1/2)

Inspiré d'une histoire presque vraie.

Au Concert

Les amateurs de rock sont plus grégaires que les bergers qui suivent leurs moutons durant la transhumance, plus prévisibles que l'ennui qui pointe au collège lors des cours de technologie, moins surprenants que les douleurs aux mollets après un marathon.

Annoncez la venue du groupe du moment (titre purement honorifique (mais ô combien vendeur) autrefois décerné (pour une période variant de une à trois semaines) par le New Musical Express (ou NME), ex-référence britonne de la presse musicale) dans une salle parisienne, vous verrez les rockeux se ruer vers la billetterie la plus proche ou s'acharner sur la touche F5 de leur clavier d'ordinateur pour arracher le précieux sésame qui leur ouvrira les portes du concert à ne pas manquer. Vous les apercevrez ensuite, qu'il pleuve ou vente ou neige ou que le soleil fasse fondre le macadam du trottoir, lookés comme il n'est plus permis depuis le vrai faux décès de Ziggy Stardust (3 juillet 1973), faire la queue devant l'entrée de la salle de longues heures durant, parfois même depuis la veille voire l'avant-veille du concert, afin de se garantir les places les plus proches de la scène où sévira le sempiternel quatuor guitare / basse / batterie / chant.

Dans quel but ? Écouter de la musique... en prendre plein les oreilles, se saturer les tympans de décibels, sentir vibrer la basse et la grosse caisse dans la poitrine, hurler à tue-tête des refrains en anglais qui paraissent stupides une fois traduits dans la langue de Molière d'Éric Chevillard, pogoter, sauter (plus ou moins) en rythme, bref... vivre la musique...
Demandez à tous ces fans de musique rock, psychédélique, rhythm'n'blues, métal, hard, lo-fi, progressif, punk, new-wave, no-wave (liste loin d'être exhaustive) pourquoi ils sont venus, pourquoi ils ont dépensé 40, 50, 60, 80 euros pour leur billet de concert. Invariablement, comme s'ils reprenaient en chœur un refrain d'hymne de stade (le stade de France programme dans l'année plus de spectacles et de concerts, y compris rock, que de matches de football et de rugby réunis), comme s'ils avaient appris, livret du CD en main, leur ritournelle par cœur, ils vont répondront sans surprise aucune qu'ils sont venus... voir et écouter jouer le groupe.
Les plus audacieux (certainement conscients de leur manque d'originalité) avanceront qu'ils profitent également de l'occasion pour découvrir l'autre groupe, celui qui joue en première partie ou qu'ils apprécient aussi, lors des concerts, se retrouver et boire une mousse entre copains. Néanmoins, tous admettront que c'est le groupe dont le nom s'affiche en grosses lettres de néon rouge sur la façade de l'immeuble, au-dessus de l'entrée, le groupe en tête d'affiche qui les a attirés dans cette salle à l'odeur de chaussettes sales, de sueur, d'urine et de bière tiède et les oblige à supporter bousculades, orteils écrasés et acouphènes (pour ne citer que quelques-uns des indésirables effets secondaires répertoriés d'un concert de rock).


Pas moi.

mercredi 13 novembre 2019

Versailles (3)

Les mêmes pins que sur un autre gouâchis peint le même jour... j'avais, entre les deux barbouillages, simplement changé d'angle de vue (et d'intention).


Sans titre
(24 x 32 cm)







mardi 12 novembre 2019

03-05

Bling... zut !
Blang... merde !

Malgré 17 ans
De vie commune
De pratiques diverses
D'incessantes tentatives
De dialogue
Nous n'avons toujours pas trouvé
D'accord - pas même mineur -
Ma guitare et moi

Art et Lutherie

lundi 11 novembre 2019

En Retard (5)

Je ne m'appelle certes pas Philippe mais Maurice (je ne touche aucune rémunération pour cette publicité malencontreuse pour le tabac). Maurice est mon prénom. Maurice est également mon nom. Je m'appelle Maurice L. Maurice. C'est évidemment un pseudonyme. Qu'on se le dise, si Maurice L. Maurice était effectivement mon nom de baptême, il y a bien longtemps que j'aurais entamé auprès de l'administration compétente (ne serait-ce pas ce qu'on appelle un oxymoron ? la plaisanterie, je l'admets est facile, peu recherchée) les interminables démarches pour changer d'état civil. Ce pseudonyme, que j'abrège régulièrement en MLM (ce qui n'a jamais signifié 1950 en chiffres romains), je me le suis choisi après un voyage loin d'être aussi tordant qu'annoncé (par ma très chère mère) avec trois hommes (et un chien) dans un bateau.
Bref, bien que non pourvu du prénom évoquant l'amour de la prétendue plus belle conquête de l'homme, cette évocation graphique, sur ma chemisette, sur mon polo (anticipons un peu, gagnons du temps) des hauts faits de ce grand personnage de l'Histoire décuple, centuple, milluple mon hardeur, ma hardiesse, mon hardition, mon harditisme, mon hardureté... l'excitation (et la douleur) me font perdre mon latin - ce n'est qu'une expression (je n'ai jamais été un fort en thème) pour exprimer le fait que je cherche péniblement mes mots...
Placé sous le haut patronage du Grand Duc, je suis plus que jamais déterminé à ne plus perdre de temps supplémentaire et à abattre les obstacles qui se dresseront sur mon chemin. Qui tentera de me freiner sera balayé. Qui tentera de m'arrêter sera écrasé. Qui tentera de me dérouter sera anéanti. Qui parviendra à me stopper sera maudit sur sept fois sept générations.

dimanche 10 novembre 2019

En Retard (4)

Souffler sur le contenu d'une tasse chaude n'a jamais refroidi le liquide qu'elle contient ou seulement de manière négligeable. Souffler sur une tasse de thé ou de café est inefficace et, par conséquent un peu ridicule. Avoir l'impression de boire un café moins chaud après avoir soufflé dessus, c'est faire preuve d'auto-persuasion, presque de superstition. M'épargnant ce genre de sornettes, je porte directement le bouillant breuvage à mes lèvres... que je me brûle en même temps que la langue et le palais... bref en cinq mots comme en un, je me crame la gueule.
Mes malheureux et malencontreux réflexes étant ce qu'ils sont (je dois bien faire avec, je n'ai pas vraiment le choix), je lâche sous le coup de la douleur buccale ma tasse qui vient se fracasser sur le plan de travail. Le café, lors de la chute puis de l'explosion de la tasse, est projeté en tous sens. Le café gicle, le café arrose, le café se répand. Et le café tâche les murs, les portes de placard,  le sol, le plan de travail, les ustensiles non rangés et ma chemisette - je n'ai pas encore remarqué que je porte un polo et non une chemisette, ceci viendra plus tard.
Le test de Rorschach qui se forme sur le tissu (et me brûle la peau du torse au travers du tissu) reproduit de façon incroyablement précise une carte de la Bourgogne (Duché et Comté) à l'apogée du règne de Philippe le Hardi - il faudrait (mais je ne peux présentement me le permettre, ne pas avoir le temps ôte tant d'opportunités de loisir...) tout de même, pour en être certain, que je vérifie le tracé de l'une ou l'autre frontières sur une carte que je conserve précieusement dans le fouillis des notes et documents sur tout et sur rien que j'accumule compulsivement.

samedi 9 novembre 2019

En Retard (3)

Me dirigeant, pas encore tout à fait remis de ma surprise chemisée, d'un pas incertain, vers la porte d'entrée - qui, dans quelques instants, pour être tout à fait rigoureux (ce n'est pas parce que je suis en retard, pressé, que je ne dois être précis), fera cependant office de porte de sortie  - de l'appartement, me voilà confronté à un nouvel événement impossible : une tasse de café fume (le verbe fumer en pareilles circonstances m'a toujours paru impropre : ce n'est que de la vapeur) sur le plan de travail de la cuisine.
Impossible, disais-je, car je ne l'ai pas préparé, ce café. Trop à la bourre, je n'ai pris le temps ni de moudre les grains de café, ni de remplir le réservoir de la cafetière, ni d'installer le filtre, encore moins de regarder l'eau couler et percoler à travers le marc (dont le c final ne se prononce pas - comme dans les noms de monuments vénitiens attachés à l'évangéliste : un archaïsme de prononciation semble-t-il).

Investiguer et découvrir qui a bien pu me le préparer, ce café, alors que je vis (et passe mes nuits - je vous vois venir... non, ce texte ne sera pas érotique) seul (non désespérément seul mais volontairement seul - on m'a dit qu'avec ma manière de vivre, jouant constamment à l'artiste, m'infligeant perpétuellement des obsessions et m'inventant régulièrement de nouveaux tocs, j'étais proprement invivable, insupportable, on m'a dit qu'il faudrait que je fasse des efforts et change pour pouvoir ne serait-ce que cohabiter avec quelqu'un : j'ai suivi ces conseils et décidé de cesser de fréquenter de trop près mes soi-disant semblables (dans lesquels d'ailleurs, je le reconnais, je ne me reconnais pas tant que ça)) serait une occupation formidablement stimulante, exaltante même. Il y aurait là de quoi remplir le vide de plusieurs journées et noircir quelques dizaines de pages. Une enquête approfondie sur un de ces événements inexplicables qui font tout le sel de ma vie, c'est tout à fait le genre de textes que j'écris habituellement... je n'ai malheureusement pas le temps pour cette littérature... nous sommes ici plutôt au début d'un road-movie (devrais-je dire road-text ? road-book ?) piéton... et je suis en retard, très en retard... ce mystère caféiné restera inéclairci, une prometteuse nouvelle restera page blanche - nonobstant les petits carreaux pré-imprimés, il va de soi...

vendredi 8 novembre 2019

A new career in a new town

Complètement lassé de mon ingrat métier et de mon salaire de miséreux fonctionnaire, je me suis mis en quête d'un nouveau travail. Et j'ai trouvé une offre d'emploi plus qu'intéressante. Boîte a priori sympathique, localisation idéale et surtout rémunération très alléchante.
Évidemment, je n'ai rien compris à l'intitulé du poste, rien compris à ce en quoi consiste le boulot qui semble excessivement loin de mon domaines d'expertise. Mais bon, pour un tel paquet de fric, je suis prêt à ne rien comprendre à ce que je fais...

jeudi 7 novembre 2019

01-22

Dans nos cahiers de poésie
Quatre pages
Sans photographie
Pour
La Postérité du Soleil

Hommage et Dette

mercredi 6 novembre 2019

Scham

Carnet de croquis

Oui, il y a du Cri de Munch.
Oui, il y a de la période bleue de Picasso comme dans Cruci-Fiction (mon bleu personnel est le Ton Bleu de Céruléum 323 de la marque Sennelier).
Oui, il y a (ou, du moins, j'ai essayé qu'il y en ait) du Alien...
Oui, de nouveau, le résultat est très simple - mais cette fois, c'est totalement voulu.

Scham
(20 x 50 cm)

mardi 5 novembre 2019

Amours

La littérature, la peinture, l'écriture, le cinéma, le football, la musique, les mathématiques, les livres, les disques, les musées, le snooker, les échecs, l'histoire, le tennis, le scrabble, la poésie... tant de choses que j'aime et qui m'intéressent... mais... un doute... est-ce que j'aime vraiment tout ceci ? est ce que tout ceci m'intéresse vraiment ? ou est ce que j'aime me dire que j'aime tout ça et que tout ça m'intéresse ? ne serait-ce pas une image de moi aimant tout ceci et intéressé par tout ceci que j'aime avant tout ?

lundi 4 novembre 2019

Vocation

J'ai refusé de suivre l'exemple de mes parents et de travailler à la Poste.
Hors de question pour moi de vivre d'expédients.

dimanche 3 novembre 2019

En Retard (2)

J'ai à traverser tout Paris. Le détour par l'armoire et la penderie est obligatoire si je ne veux exposer ma (certes fort modeste) virilité aux passants qui n'en demandent certainement pas tant et risquer, pour exhibitionnisme, un passage par la case Prison (sans passer par la case Départ, sans toucher 20000 francs - l'enfantillage de cette parenthèse me ralentit... il faut que je me concentre davantage pour garder un rythme trépidant) qui, assurément, me retarderait plus encore. Je ne flâne cependant pas au milieu de mes étagères couvertes de la pointe en matière de mode. Au hasard, comme ils me tombent sous la main, sans les choisir, sans me soucier des couleurs, des motifs et de leurs harmonieux et mutuels accords - la réputation d'élégance dandy et de chic trendy que j'avais mis des années à me bâtir va en prendre un sacré coup... tant pis, il y a urgence : il faudra composer avec mon allure auguste pour la suite de ce roman (oui, j'ai de l'ambition pour ce texte) - j'enfile une chaussette, une deuxième, un pantalon et une chemise dont les courtes manches m'incitent à penser qu'il s'agit d'une chemisette.
Je n'ai pourtant, je suis formel, jamais (oh, non, jamais !) acheté de chemisette... pourquoi aurais-je acheté une chemisette... pourquoi aurais-je dépensé de l'argent pour une chemisette... moi qui ai les chemisettes en horreur... moi qui trouve les chemisettes laides et moches et ringardes (plus encore lorsqu'elles sont portées avec une cravate) et même, si je puis dire, un peu absurdes (d'une chemise, il suffit de retrousser les manches si besoin est, alors que d'une chemisette, on ne peut allonger les manches lorsque c'est nécessaire)... à moins que je n'ai acheté cette chemisette par erreur... ça arrive les erreurs... même à moi, il m'arrive de faire des erreurs...

Quitte à anticiper quelque peu sur le récit et afin de ne pas, plus tard, freiner l'élan de celui-ci par une digression inutile, je m'apercevrai plus loin dans le texte que de chemisette il n'est pas question mais qu'il s'agit d'un simple polo. Comment j'ai pu confondre - même dans la précipitation - une chemisette et un polo, en revanche, ne sera pas expliqué...

samedi 2 novembre 2019

En Retard (1)

En retard.
Comme le lapin blanc d'Alice et Lewis, je suis en retard, très en retard.

Le bain brûlant que je m'étais fait couler refroidira sans me réchauffer. L'abondante mousse formée à la surface de l'eau ne cachera pas ma marinante nudité et, abandonnée, retombera lentement en un bouillon glauque vaguement savonneux. Le bateau en plastique qui devait m'aider à combattre l'ennui d'une heure passée à regarder ma peau friper restera à quai, sur le bord blanc de la baignoire.
La douche également ce sera pour une autre fois. Je n'ai pas le temps. Vraiment pas. Pas même pour un rapide coup de gant de toilette à peine humide sous les aisselles et sur les parties -  une toilette de chat comme disait l'autre. Je renonce même au parfum et au déodorant, ils ne feront de toute façon pas illusion bien longtemps lors de ma course folle à travers la ville. Je fais - pour résumer (si le besoin se fait déjà sentir à ce stade du récit mené tambour battant) et ne se semer aucun lecteur - l'impasse complète sur le soin et l'hygiène afin de gagner (ou plutôt ne pas perdre) quelques précieuses minutes : il faudra, pour la suite de cette histoire, s'accommoder des odeurs de sueur, d'urine et de pollution nocturne.

vendredi 1 novembre 2019

Sepia

J'ai (trop) peu travaillé à Venise. Aucun dessin dans mon Carnet de Voyage - pas pris le temps. Quelques clichés (Venise n'en manque pas, de clichés... ils sont heureusement tous vrais) pour un compte Instagram que j'ai ouvert à l'occasion (vous y trouverez peut-être quelques explications). Deux trois idées assez pauvres de jeux de mot ou de plaisanteries qui n'ont fait que remplir de leur nullité les billets de début de semaine de ce blog.

J'avais emmené le cahier qui contient le manuscrit de mon projet actuel En Retard, je n'y ai presque pas touché.

Mon dernier repas sur place, dans un restaurant quelque part entre la Place Saint Marc (prononcer le c final pour ne pas vous faire reprendre par Natacha ou lui donner, s'il vous plait, une explication convaincante pourquoi on devrait dire saint marre) et la Gallerie dell'Accademia, avait goût d'encre qui seiche.